Sous ton pull orange vomi, j'ai envie de creuser.
Au dessus de ton plexus solaire, en dessous de ton sternum creux, à gauche de ta droite.
Il fait froid ici et ce n'est pas encore noël, et je sais que, près de moi, il n'y a de cœurs plus accueillants et chauds que le tien. Il fait froid et parfois je tremble.
Les flammes flamboyantes et éphémères d'un feu ne fredonneraient pas assez longtemps pour me réchauffer.
Je veux bien me faire petite, rentrer mes genoux, et courber mon cou vers ma poitrine, et peut être alors, je pourrais n'occuper que la moitié de ton cœur, même pas.
Je ne sais pas vraiment comment c'est, à l'intérieur. Tu sais bien que je n'ai jamais habité d'organe chaud et plein de sang.
Le cœur que j'ai le mieux habité était une grotte de glace ; la lumière y coulait paisiblement, mais ne faisait jamais rien fondre. Il y faisait très froid, et les reflets du soleil lui donnaient comme une parure d'or. Mon souffle y formait un très léger nuage suave, dont, par un phénomène étrange, quelque gouttes s'échappaient, cristallisées, pour enfin se briser au sol. Ce cœur était merveilleux, mais il est loin, désormais. Très loin. Trop aussi. Mais ça, c'est le genre de choses que l'on ne dit pas vraiment.
J'ai aussi habité, et habite encore parfois, un cœur d'une étrangeté charmante. C'est un cœur chaud, si chaud qu'il exhale les effluves qu'un cœur transpirant se doit d'exhaler. Il est ampli d'objet d'un goût bien douteux, et de personnages des plus embarrassants. C'est un cœur dirigé par la passion, ou règnent le désordre et la vie. C'est un cœur épuisant, mais extrêmement attachant, tu dois t'en douter. Des fois je ne sais pas trop quoi en faire, il demande tant de vie.
Les autres cœurs sont exigeants, et me demandent un laissez-passer que je n'ai jamais eu envie de fournir, et de ce fait, que je n'ai jamais fourni. D'ailleurs l'aurais je pu ? Qui donc pourrait savoir ce qu'il est, et ce que l'on attend de lui. Ca ne m'intéresse pas.
Mais toi, ton cœur à toi, celui sous ton pull orange vomi, derrière ton écharpe rayée, bien en dessous de tes cheveux un peu roux qui décrivent les palais d'Istanbul, sous ta peau si pale, sous ta chair, je suis sûre que je pourrais m'y asseoir, sans justification, juste pour une après midi, sans payer. Et j'aurais le droit parce qu'il fait froid, parce que nous savons tous deux que 13 est un chiffre porte-plafond, et parce que maintenant, j'écris bien ... Et j'aurais le droit parce que je le veux. Je resterai un peu, le temps de boire tranquillement une pinte, en te regardant. Il y aura sûrement des cerisiers en fleurs que le vent rendra encore plus gracieux. Et je te regarderai, et toi tu ne me verras pas, ce qui est très pratique. Peut être que je pleurerai. Juste pour le geste, pour la beauté du geste. Et je serai bien ce jour là, ce jour où on aura le temps de faire ça. |