Le cinéma coréen (3) Posté par hotarukali le 22/04/2006 00:00:57
Mars 2006, de retour au bercail, je cours jusqu'à mon magasin préféré, vidée, en manque d'une drogue que je ne cherche même plus à combattre, et proclame solennellement "Sésame, ouvre-toi". Je prends peur : les rayons ont changé de place et il n'y en a plus que deux qui se battent en duel. Paniqués, mes yeux parcourent l'espace et, comble du soulagement, découvrent que tout un pan de mur est couvert de DVD. Ouf !
Ne tombe pas dans les pommes
Résultat des courses, après avoir sondé l'intégralité des étagères de A à Z, + les chiffres, ainsi que les DVD musicaux et d'humour - au cas où le petit malin toujours de service dans la région se soit une fois de plus mis de côté un chef-d'œuvre – je défaille, je défaille (voix hystérique) (Spéciale dédicace pour Satanas) ... La cause de mon malaise : pas moins de trois films sud-coréens. Deux films de guerre et une autobiographie. Le choix s'avère difficile, il me faut un temps de réflexion. Ma petite sœur est allée se perdre dans les CD de rock, ce qui me laisse pas mal de temps pour penser. Je vais devoir étudier finement les jaquettes, c'est ma seule chance de m'en sortir...
Am stram gram
Porte n°1 : Silmido de Kang Woo-Suk. C'est une île qui a le rôle-titre, celle sur laquelle furent entraînés les 31 criminels recrutés par le gouvernement sud-coréen pour aller trancher la gorge du président de la Corée du Nord. C'est tiré d'une histoire vraie –en fait, le début et la fin sont vraies mais ce qui est arrivé sur l'île est une fiction - et on nous annonce qu"Après 35 ans de silence, l'inavouable vérité (est) enfin dévoilée", et là, pour le coup, je trouve cela un brin théâtral. Est précisé que c'est un film qui a besoin de l'accord parental... Pas moi !
Porte n°2 : Frères de sang de Kang Je-Gyu. Le film a remporté plusieurs titres, dans son pays d'origine tout du moins, qui sont plus ou moins mis en valeur sur la jaquette d'une édition double DVD (c'est précisé mais en fait je n'ai pas aperçu d'autres éditions de ce même film). Deux "Blue Dragon Award" : meilleur acteur et meilleurs effets spéciaux, mais également meilleure direction artistique, meilleur directeur de photographie et qualité des effets sonores du film aux Grand Bell Awards, ou Oscars sud-coréens. Le film conte l'histoire de deux frères que la guerre risque de séparer. Conflit Corée du Nord/Corée du Sud oblige, les autorités enrôlent un homme par famille et récupère le petit frère. Sauf que son aîné ne voit pas les choses du même œil et, voulant le ramener, se fait embarquer de force dans ce long périple. Du jaune en bas du dos de la jaquette attire mon regard... Interdit au moins de 12 ans lors de sa sortie en salles... En même temps, on est prévenu : c'est un film de guerre pas Martine à la plage.
Porte n°3 : Comparé aux deux premiers, celui-ci à l'air plus calme. La face de la pochette est plus lumineuse et les personnages, pas couverts de boue avec armes et casques tout autour. On imagine bien qu'il s'agit de quatre amis, puisque c'est le titre : Friend. Donc ça semble plus léger. Je dis bien "semble" parce qu'il suffit de retourner l'objet pour se rendre compte que les apparences sont peut-être trompeuses : il y a du sang, des battes de base-ball et des regards tristes mais pas une seule image de joie. Ça promet ! L'histoire vraie quoique probablement légèrement romancée du réalisateur Kwak Kyung-Taek n'a pas vraiment l'air réjouissante. Aucune décoration d'un quelconque festival mais une citation présentant le film comme "Il était une fois en Amérique à la sauce coréenne". C'est dommage, je n'ai jamais vu Il était une fois en Amérique. Ce n'est donc pas avec cela qu'on va me convaincre.
Chaque DVD me fait les yeux doux, m'appelle d'une voix envoûtante et le choix est dur. En outre, les deux derniers films présentés portent à leur générique Jang Dong-Gun, acteur présent dans 2009 Lost Memories le premier film sud-coréen que j'ai vu... (cf "le cinéma coréen (1)) Comprenez- donc que c'est un lien affectif qui me lie déjà à ces deux-là. Surtout que je sais bien qu'au final, je prendrai les trois, que ce soit en une ou plusieurs fois ! Et effectivement, en deux, trois fois (mais en moins de cinq jours) je me retrouve avec tous ces films sur mon meuble télé. Mais comment sont-ils arrivés là ? Je ne me souviens de rien. Ce n'est pas moi. Ou peut-être que si, mais sous l'emprise d'un charme très puissant alors ! Je n'y suis pour rien, je ne me contrôle plus lorsqu'il est question de films sud-coréens.
Sous influence
Trêve de bavardage, il est grand temps de les regarder. A ma grande surprise, les films de guerre ne sont pas un vulgaire appel au patriotisme de ses spectateurs originels. Au contraire, Silmido dénonce les agissements de son état, ou plutôt de son gouvernement. Frère de sang, quant à lui, s'il n'est pas aussi vindicatif que son confrère vis-à-vis de sa politique, c'est parce que ce n'est pas son propos. D'ailleurs la guerre est-elle seulement son propos ? Et bien, à vrai dire, pas vraiment. Le contexte aurait pu être différent, mais le cœur de l'histoire reste la fraternité : Jin-Tae protège son jeune frère, d'abord en l'élevant à la mort de son père, puis en travaillant pour payer ses études et finalement en l'accompagnant sur le front. Ce n'est pas de la grande propagande, d'une part parce que côté Sud aussi, on nous montre des exécutions pour le moins sommaires, et d'autre part parce que les deux frangins se battent car ils n'ont pas le choix et non pour une quelconque idéologie (c'est prouvé, mais il faut voir le film sinon je vous en dévoile trop). Le film commence par le début de la fin et ce n'est pas plus mal... Parce qu'un doute plane quand même ! Silmido débute bien par le commencement et c'est tant mieux quand on ne connaît pas l'histoire dont le film s'inspire ! Le conflit Nord/Sud qui déchire la Corée, on en parle vaguement en terminal (enfin dans la filière que moi j'ai suivi en tout cas) et finalement c'est bien dommage, j'aurais préféré en savoir plus. Je trouve ça déjà terrible que des frères s'entretuent pour les idées des autres, surtout quand les autres ne se tapent plus dessus depuis plus de dix ans, et pour cause : l'un des deux protagonistes a été anéanti : l'URSS. Du coup, les USA sont tranquilles de ce côté-là, mais entre temps, la Corée leur a servi de champ de bataille. Et ne me dites pas que s'il n'y avait pas eu cette guerre, je n'aurais pas eu ces deux films parce que s'il n'y avait pas eu cette guerre, il y en aurait sûrement eu plein d'autres... Quel pays n'a jamais été en guerre, franchement ?
Passons à Friend. Finalement, ce n'est pas si triste... Finalement, si. Disons que ces quatre amis se connaissent depuis la cour d'école, donc ça ne peux pas être si sombre que cela quand ils sont enfants : les enfants, même dans le malheur, arrivent à sourire. Mais voilà, un enfant grandit vite et en une fraction de secondes, tous ont pris dix ans. Et là, les choses se gâtent. Dangereusement. Deux d'entre eux choisissent la voie des études, les deux autres la voie du crime. Ces choix me font penser à une chanson de rap français avec plein d'artistes excellents "Relève la tête", qui dit : "Il vaut mieux un bon CV qu'un gros gun car un gun s'enraille alors qu'un bon CV te met sur de bons rails !" Ce film est un peu l'illustration de ce propos finalement. A vous de voir le film maintenant...
Merveilleux film
Lectorat chéri, me voilà à un moment capital de ma jeune existence : 11 avril 2006,21h 32, assise dans mon lit et l'ordinateur sur les genoux, je viens d'insérer Wonderful Days de Kim Moon-Saeng dans mon lecteur. La présentation est impeccable, le menu joue une belle musique... Je suis déjà dans l'ambiance. Tout me rappelle ce qui m'a donné envie de voir le film : une image. Oui, plus que de savoir que c'est un film coréen (ce qui est un sacré bonus à mes yeux), une image m'a rendue gaga de ce film avant de le voir. La voici.
Il existe certainement plusieurs éditions de ce film en DVD. La seule qui me soit tombée sous la main est faite de deux disques (film et bonus) entourés d'un beau coffret irisé.
Je vais donc vous abandonner le temps de savourer le contenu de cette petite "Magic Box" et vous retrouve après pour des réactions à chaud.
Il est presque 23h00. Le film se termine sur un générique à la musique enchanteresse, mais il avait commencé sur une voix : Une jeune femme aux cheveux rouges nous conte une histoire : celle de notre planète, qu'elle habite près d'un siècle et demi plus tard, en 2142. La voix française est magnifique, le ton n'est pas exagéré, l'actrice de doublage à elle seule me donne envie de continuer le film, et j'apprécierai même que toute l'histoire ne soit racontée que de cette manière. Bravo à elle, donc. Notre ciel bleu, elle ne l'a entraperçu qu'une seule fois, enfant. Une cité appelée Ecoban puise son énergie dans la pollution, que nous, et toutes les générations futures, leur avons laissée en héritage. Bientôt cette ville va entrer en guerre contre celle de Marr, dans laquelle se réfugient certaines personnes. Un conflit destiné à
anéantir les révoltes et à créer suffisamment de pollution pour pomper un maximum d'énergie pendant un maximum de temps...
Je ne vous en dis pas plus pour ne rien dévoile. Sachez juste que la musique est aussi belle que le ciel que les personnages rêvent de revoir...
Ce film est délicieux, tellement plein de saveurs : on y goûte l'Asie et sa sagesse, l'animation et sa poésie, l'enfance et ses espoirs. C'est très, très, très différent d'un Miyazaki ou d'un Takahata, mais se rapprocherait un poil plus du Ghost in the Shell de Mamoru Oshii.
Je vous avais prévenu en vous parlant d'Oseam : en matière d'animation, la Corée s'élève au niveau du Japon. Verra-t-on bientôt un phénomène de "Coréanimation" de grande importance sur le modèle de la "Japanimation" ? La Corée est certes encore moins prolixe que son voisin dans ce domaine, mais avec le temps, tout est possible.
Qu'ils sont beaux
Je voudrais juste préciser que tous les films dont je vous ai parlé de Old boy à Wonderful Days nous font en plus profiter d'une très belle édition DVD. Le contenu est formidable et la jaquette le reflète bien. Ce sont toutes des éditions double DVD qui donnent très envie de voir ces films. Vous trouvez peut-être que c'est très puéril de s'attacher au visuel de l'emballage, mais pour ma part, si la pochette ne me donne pas envie, c'est un peu mort.
La vraie fin
Je sais... Les cinéphiles partageant ma passion sont en train de s'arracher les cheveux, à défaut de pouvoir m'arracher les yeux... Pardon, pardon, non je n'en ai pas vu d'autres. Snif ! Je n'ai même pas encore pu voir un Kim Ki-Duk ! La fin de la trilogie Park Chan-Wook non plus... Je n'ai pas eu le plaisir de voir Lady Vengeance ! Mea maxima culpa (Spéciale dédicace à Minipouce cette fois) ! Il faut me comprendre, quand je suis dans mes rayons favoris, je ne cherche jamais de sortie DVD particulière, je trouve toujours au hasard. Mais promis, dès que j'y retourne, je tente de faire l'acquisition des Kim Ki-Duk que je pourrais trouver ! Croyez-moi, je suis plus effarée que vous de ne pas les avoir déjà engloutis ! Et dès que c'est fait, je vous en donne des nouvelles...
Re: Le cinéma coréen (3) Posté par tchit le 25/04/2006 16:49:02
Aaaaah sympa ces articles sur le cinéma Coréen !! Depuis que j'ai subi la révélation Old Boy, dans une salle obscure un 8 octobre 2004 (à voir impérativement sur grand écran, malheureusement c'est plus trop possible), je suis très très attiré par ce cinéma. Mais faute de temps (hum, de mouvement plutot), et de connaissances, je ne savais pas trop vers quoi me tourner comme films. Je vais tirer bon profit de tes articles
Bravo encore !
PS. Tiens justement j'ai emprunté Ivre de femmes et de peinture, hier,