Extrait du site https://www.france-jeunes.net |
L'altermondialisme |
L'altermondialisme est un mouvement qui prend sa source dans les contradictions de notre monde actuel. Il est le symptôme d'une situation historique paradoxale. Loin d'être un simple phénomène de mode, il mérite donc toute notre attention. |
On a pu tout entendre sur le mouvement altermondialiste; communistes attardés, anarchistes immatures ou, à l'opposé, "détenteur des clés d'un autre monde" (selon les termes de l'un d'entre eux). Dans cette lutte passionnée entre les défenseurs d'une alternative à notre société et les penseurs néo-libéraux ou néo-conservateurs, il est clair que la plupart d'entre nous ne parvenons à trouver notre place ni dans l'une ni dans l'autre de ces visions antagonistes. Je ne prétends pas pouvoir offrir ici quelque vérité sur la façon de considérer cette problématique. Par contre, dans le calme silencieux d'un article, il convient de revenir sur les fondements de cette lutte anticapitaliste. Qu'importe au fond si "la solution altermondialiste" est plausible ou non, si elle est bénéfique ou au contraire serait synonyme d'une régression pour notre société ! Tout ceci appartient au domaine de la croyance à une idéologie. Par contre, il est indéniable que l'altermondialisme est bien un symptôme du contexte actuel, dans lequel la politique semble à genou devant les milieux économiques. C'est l'évolution historique qui a conduit à cette situation que j'entends retracer dans les lignes qui suivent. Le XIXe siècle comme laboratoire de la future société capitaliste Il faut remonter au XIXe siècle pour saisir les enjeux actuels liés à la lutte altermondialiste. Et le XIXe siècle, c'est avant tout l'expansion de la Révolution Industrielle. 1850 : le modèle anglais du libre-échangisme s'impose peu à peu dans toutes les nations européennes. Se dessinent alors, dans les décennies qui vont suivre, deux idéologies économiques opposées : le libéralisme (soutenus par les bourgeois qui prônent le développement universel du mode de production capitaliste) et le marxisme ("prolétaires de tous les pays, unissez-vous !"). Dans les deux cas, il s'agit de deux idéologies qui pensent le monde de manière globale. Dans un cas, l'on espère un monde pacifiste et sans frontière, ce qui permettrait l'accroissement des échanges économiques et donc de la richesse mondiale. Dans l'autre, l'on ne voit qu'une solution par l'union des asservis du monde entier. C'est le temps des grands espoirs. Mais les choses vont changer... Oui, car deux décennies plus tard l'Europe apprend dans la douleur que le capitalisme peut générer des crises. Celle-ci, la Grande crise, durera plus de 20 ans. Les frontières se ferment; le protectionnisme empêche la croissance des marchés et les investissments internationaux. Loin est le temps du libre-échangisme triomphateur. Alors, on sombre dans la période noire de l'impérialisme. En effet, si les partenaires européens se font rares et si les débouchés en Occident disparaissent durant cette première dépression globale, les régions colonisées serviront dès lors de nouveaux marchés pour l'investissement de capitaux. Quitte à utiliser les sauvages ! Et l'Afrique est partagée en moins de vingt ans entre les Seigneurs blancs qui n'hésitent pas à massacrer pour sauver leur économie. On pille, on tue sans scrupule. L'Europe exporte ses aventuriers parasites pour continuer l'expansion des marchés capitalistes. Parallèlement au colonialisme, le mouvement des nationalités se développe en Europe. L'économie se nationalise de plus en plus sous le coup du protectionnisme. La politique fait de même. Même les socialistes suivent ce courant et oublient leur perspective internationale. Peu à peu, les leaders marxistes ont senti que la lutte universelle était inenvisageable, du moins dans un premier temps. Ils obtiennent des victoires sur le plan politique, ce qui les encourage à mener la politique des "petits pas". Par exemple, les heures de travail sont abaissées et les enfants sont peu à peu mis à l'école plutôt qu'à l'usine. Ainsi, autant l'espoir d'un monde libre-échangiste des libéraux est oublié sous le coup de la compétition impérialiste, autant l'Internationale socialiste se transforme en une réunion de partis nationalisés de gauche. Aujourd'hui : le paradoxe Au fond, vous vous demandez probablement quel est le but d'effectuer une telle digression sur des événements historiques qui semblent si loin de nous. Il est vrai que le monde a bien changé au cours du vingtième siècle. Néanmoins, l'asservissement du politique au monde économique ne peut être que saisi en comprenant le sens de cette "genèse du capitalisme". En effet, force est de constater que cet "esprit" national qui s'est créé dans les dernières années du XIXe siècle a subsisté de nos jours. Les visées politiques sont en majeure partie adressée au territoire nationale. Les structures institutionnelles sont de même limitées aux frontières des pays. Et tout ceci est le résultat de cet élan national (iste) du dernier XIXe. La problématique réside ici. Car, si au XIXe siècle la nationalisation de la vie sociale et politique avait coïncidé avec une nationalisation de l'économie (protectionnisme), ce n'est plus le cas aujourd'hui. Il est évident que l'économie, sous l'effet des politiques néolibérales, se joue au niveau international, tandis que les structures obsolètes de la politique restent bornée à l'état. La politique – héritière malheureuse d'un système inadéquat pour le monde actuelle - ne peut donc plus intervenir sur l'économie. Il en résulte par exemple et pratiquement la position ambiguë de la gauche européenne. Elle ne pourrait pas mener de véritable politique socialiste, même si un de ses partis représentants prenait le pouvoir, étant donné qu'elle n'a pas les capacités d'interagir dans le monde économique international. "There is no alternative" comme le disait Thatcher ! Tout le monde ne peut que se plier à l'ordre libéral. Si des gauchistes tentaient de se dissocier de cette équilibre dans un quelconque pays, ils entraîneraient leur état à la mort économique. Le Portugal en a fait les frais il y a quelques années. voilà donc pourquoi tous les états occidentaux se plient au nouvel ordre économique qu'ils soient de gauche ou de droite. C'est ici qu'intervient l'altermondialisme. Ce mouvement symbolise la volonté de renouer avec un courant internationaliste du socialisme qui a disparu depuis que ces partisans agissent au sein des structures institutionnelles de chaque pays. Car le socialisme ne peut que se concevoir globalement, sinon il signifie renferment sur soi et pire même ! Dès lors, la solution pour les membres altermondialistes est d'agir sur le plan "apolitique", étant donné que celui-ci a fait preuve de son incapacité flagrante à régir la société. Je crois que, même si l'on n'est pas en accord avec leurs propos et leurs idéologies, l'on ne peut qu'applaudir cet élan (ré) novateur. Au fond, je pense que les partisans du capitalisme eux-mêmes ne peuvent se satisfaire de la situation actuelle et de cette paralysie politique. Tocqueville avait dit : "à une structure sociale donnée, une structure politique doit correspondre". Or aujourd'hui, c'est tout sauf le cas. L'économie tourne au dessus de nos têtes, pendant que nous tentons de survivre, impuissants. Il est temps que cela change ! ; les hommes doivent retrouver leur capacité à maîtriser le monde dans lequel ils vivent. Sans cela, la perspective catastrophique de Marx se réalisera : un monde dans lequel tous se tueraient à la tâche simplement pour que le Dieu-capitalisme, créé inconsciemment par l'homme, puisse poursuivre son expansion. |
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