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Amour et passion : une opposition

En quoi la passion, le coup de foudre, sont-ils à l'exact opposé de l'Amour ? On a toujours tendance à placer ces sentiments sur un pied d'égalité. Pourtant nous ne devrions pas le faire. Une petite reflexion qui pourra peut-être aider certains malades d'amour et faire réflechir les autres.


On a tendance à considérer que la passion (quand je parlerai de la passion dans cet article, ce sera toujours de la passion amoureuse) est une forme très forte d'amour. Pourtant je veux montrer qu'il y a une distinction nette à opérer entre passion amoureuse et amour. Voire même une opposition. Mais pour ne pas créer de malentendus il convient avant tout de définir ces deux mots.


L'amour

L'Amour... Certainement l'un des sentiments les plus importants pour l'être humain. Les définitions à donner à cet état sont innombrables donc plutôt que de me montrer exhaustif et de citer chaque forme d'amour je vais tenter d'en donner une image globale. L'amour est avant tout une attirance affective. Il peut se mesurer en fonction du don de soi que peut faire l'être amoureux pour l'être aimé. Don de soi ne veut pas nécessairement dire sacrifice. C'est aussi le fait que l'amour soit désintéressé. Plus l'amour est fort, plus la personne aimante offre son amour sans conditions (c'est bien pour cela que l'amour maternel est le plus fort de tous). Bien entendu (et heureusement) nous ne sommes généralement pas assez amoureux pour aimer inconsidérément, bien souvent la raison veille.
Mais le véritable amour est donc en opposition parfaite avec l'égoïsme. On vit et on respire par et pour l'autre.


La passion

Venons-en maintenant à la passion amoureuse. On serait tenté de dire que c'est la même chose que d'être amoureux. Dans sa définition élargie, oui. Mais le mot, pris dans son sens premier, obéit à une définition assez précise. En effet la passion amoureuse a quelque chose de très schématique :
Elle résulte toujours d'un coup de foudre. Elle a toujours pour objet un but idéalisé non encore atteint, ce but pouvant souvent être inatteignable. C'est un sentiment extraordinairement fort et puissant, à la fois agréable et insupportable : généralement l'être malade de passion dit vouloir s'affranchir de ce poids terrible et pourtant se complaît – consciemment on inconsciemment – dans son malheur. Ce sentiment déraisonnable peut parfois avoir des effets très néfastes (désocialisation, suicide, crime, folie, ...). Dans une majorité de cas la passion cesse à partir du moment que le but est atteint : elle se retire comme elle est venue, en même temps que l'idéalisation de l'objet.

Besoin d'exemples ? Relisez tous vos contes de fées ! La plus grande majorité des contes avec un prince charmant les montrent pathologiquement amoureux, sous l'emprise de passions. Et tous les symptômes y sont : le prince entend un jour une voix enchanteresse sous sa fenêtre, ou reçoit une mèche de cheveux sublimes, ou aperçoit de loin une superbe princesse. Et là c'est le coup de foudre. Le prince tombe éperdument amoureux. Il lui a suffit de voir un visage, voire même seulement d'entendre une voix ou de voir une mèche de cheveux blonds, pour devenir malade de passion. Et bien entendu des obstacles se dressent au milieu de sa route : généralement il ne sait pas qui est cette princesse. Alors il s'enferme dans sa chambre, se lamente jours et nuits, s'affaiblit, refuse de s'intéresser à quoi que ce soit, refuse de se montrer et bien sûr refuse toutes les prétendantes que ses conseillers, inquiets, lui envoient. Il n'a qu'une idée en tête : retrouver cet être idéal. A la fin bien sûr, après quelques péripéties, il retrouve cette princesse rayonnante et l'épouse.

Seule différence avec la réalité : l'être adoré est vraiment un être idéal, malade d'amour lui aussi ce qui fait qu"ils se marièrent et eurent beaucoup d'enfants." Bien entendu le prince aussi est idéal, tout comme le royaume et les enfants ;)

Mais c'est un conte de fées !


Amour et passion : deux sentiments opposés

Nous avons vu ce qu'était l'amour et comment la passion obéissait à des règles établies. Maintenant il s'agit de voir les différences fondamentales entre ces deux états.
La passion a tendance à tomber sur quelqu'un comme une massu. Mais pourquoi ? Comment choisit-elle ses victimes ? La personne qui va recevoir un coup de foudre est généralement sous l'emprise d'un manque qu'elle ne parvient pas à combler. Elle poursuit et recherche un certain idéal qui, elle le sait inconsciemment, n'existe pas. Et tout d'un coup cet idéal va se matérialiser sous ses yeux. Généralement c'est dans une situation propre à la création du fantasme (je parle pas de sexualité bande d'obsédés). Les exemples sont illimités, ça peut être sur un bateau, en entendant une voix, le voisin d'à coté, une star (cible excellente pour le coup de foudre, elle est déjà pré-idéalisée !), le plus beau mec de l'école, etc. Etc. Cet idéal existe donc tout à coup. Mais bien entendu il est difficile d'accès, sinon ça ne serait plus un idéal.
Ce sentiment qu'est la passion est donc le résultat d'un besoin égoïste et égocentrique. Quand le passionné pense à l'objet de sa passion en fait il ne pense qu'à lui-même. Comment pourrait-il en être autrement quand il s'est fait de l'autre un idéal intouchable ? Et dès l'instant où cet idéal est atteint (parfois le seul but du malade est de savoir son amour connu par l'être idéal), alors comme je l'ai dit plus haut tout s'effondre. Le passionné n'a plus devant lui qu'un être humain.

Et là on s'aperçoit qu'entre ce besoin complètement égoïste du passionné et le don de soi de l'amoureux, il y a un abîme.


Petite précision

Vous allez être nombreux à me dire que vous avez déjà vu des coups de foudre se terminer en relations durables. Je vous répondrai que c'est une chose tout à fait possible. Il suffit que la passion se transforme en sentiment amoureux, chose qui arrive parfois (mais les probabilités ne sont pas très fortes). C'est exactement comme quand des gens sortent sans être amoureux et tombent amoureux par la suite ou quand des personnes non amoureuses se côtoient et finissent par tomber amoureuses. La différence c'est que l'amour peut être durable, la passion absolument pas.
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Re: Amour et passion : une opposition
Posté par acisud le 12/09/2008 09:41:41
Tchit--- Je ne veux pas dévoiler les moindres détails de ma vie privée sur le net, lol (je l'ai déjà assez fait ;-)). En gros, ça s'est terminé comme n'importe quelle relation qui se termine, quand j'ai eu la force de m'en tenir à ça.
Sinon ouais, il y a en fait du positif et du négatif qui découle de cette histoire.
Je pense qu'après une passion de ce genre, on a fait le tour de quelque chose. Donc après, soit on accepte de ne plus jamais aimer ou alors, au contraire, on commence à aimer en vrai, d'une façon moins égoïste, plus réaliste. Enfin, vaste sujet.
Re: Amour et passion : une opposition
Posté par tchit le 08/09/2008 21:20:12
acisud : ton post de 11h14 est super interessant ! C'est assez incroyable ton histoire, même si tu n'en découvres que les grandes lignes. Ca devait être extrêmement fort... Mais ce genre de relation est fait pour s'arrêter - ou mourir.
Comme tu le dis, dans la passion il y a toujours une complaisance dans le malheur. Le pire c'est qu'on est souvent conscient que c'est insensé, qu'il y a quelque chose qui ne va pas. Parfois on peut être extrêmement autocritique et clairvoyant quant à son état, pourtant on y plonge la tête la première, on y nage et on serait prêt à s'y noyer jusqu'à la mort s'il le fallait, tellement la puissance de l'émotion est réelle et indestructible.
Je n'ai pas de doute que ce genre d'expérience peut avoir un aspect positif, quand on s'en sort. D'ailleurs, comment s'est terminée votre relation ?


Sinon tu as raison, il y a un temps pour analyser et un temps pour vivre...
Re: Amour et passion : une opposition
Posté par acisud le 05/09/2008 23:27:03
Ah, c'est vrai que j'ai oublié de dire ce qu'il y avait de positif dans l'histoire; pourtant c'était comme de retrouver une partie de soi qui manquait jusque-là, c'est très très euphorisant en fait. Enfin, le point, c'est que c'était génial aussi, pas que douloureux.
Flougaussien, tu m'as demandé si, maintenant, je considérais cette expérience comme plutôt positive ou plutôt négative; je crois que ça dépend vraiment de ce qu'on veut dire par là... je ne sais pas trop quoi répondre; c'est un peu comme dans les tests où ils demandent "Vous préférez A. Le rouge ou B. Le noir", je reste toujours perplexe devant ces questions, parce qu'il n'y a pas de contexte. Je préfère les cheveux noirs aux cheveux rouges, et les fleurs rouges aux fleurs noires. Mais peut-être que j'ai une tendance à compliquer les choses, aussi. lol

À propos des films de Tony Gatlif, moi aussi je voulais en voir d'autres. Alors, "Je suis né d'une cigogne", je note. ;-)
Re: Amour et passion : une opposition
Posté par flougaussien le 05/09/2008 21:12:01
Acisud :

"Il y a un temps pour se documenter et un temps pour vivre plus instinctivement, du moins c'est mon avis."
> Tout à fait d'accord ! Faut alterner !

Sinon, merci pour les explications sur ton expérience. Je n'imagine pas le centième de ce que ça peut être (mais ça ne me donne pas envie pour autant). Ça me fait penser au film japonais "L'empire des sens", où un couple s'isole pour se consacrer à sa passion jusqu'au bout, et ça finit dans la mutilation et la mort.

"Transylvania" je n'ai pas vu ! Je vais me renseigner, merci. De Tony Gatlif je n'ai vu que "Je suis né d'une cigogne", mais je voulais en voir d'autres.
Re: Amour et passion : une opposition
Posté par acisud le 05/09/2008 11:14:51
Tchit: Se relire n'est pas une bonne idée, on se trouve toujours nul après coup. lol Reste que, objectivement, il est excellent ton article. ;-) Pour en revenir à la passion, quand on vit un truc, on se croit unique au monde, on se dit "oui mais, lui et moi, c'est différent parce que ci et ça..." (et c'est ce qui me fait dire à Flougaussien "tu ne vas pas comparer cette histoire gna gna gna gna :-S", j'ai été mesquine, là). Et surtout, on n'a pas envie de lire des rapports scientifiques qui résument notre histoire à "telle glande sécrète alors telle hormone...". lol Mais à la fin des fins, c'est du pareil au même. Je veux dire, ce n'est pas parce qu'on étudie les réactions métaboliques qu'on ne peut plus apprécier une pizza, ce n'est pas parce qu'on connaît la situation géopolitique du Moyen-Orient qu'on ne peut plus faire du tourisme à Hammamet. lol Il y a un temps pour se documenter et un temps pour vivre plus instinctivement, du moins c'est mon avis. Pareil pour la passion; c'est intéressant de savoir qu'au moment de la rencontre, on devait être tellement vide qu'on serait aussi bien tombés amoureux d'un sac de pommes, ou encore que l'objet de notre désir ressemble probablement à notre père, lol, mais à la fin, qu'est-ce que ça change? On se complaît quand même dans la sensation; on n'a rien d'autre.

Flougaussien: Ouais, une sacrée histoire... avec tous les ingrédients! lol La rencontre fortuite (et après on se dit, wow, c'est le destin, je ne devais plus ressortir, mais justement j'avais oublié d'acheter du café! ! ! lol), le coup de foudre à peu près immédiat. Deux heures plus tard il revenait chez moi et nous ne nous quittions plus pendant des semaines! Bref, je ne vais pas raconter ma vie, ce serait long, lol, toujours est-il que ça a mal tourné, on a perdu l'envie de faire quoi que ce soit, de travailler par exemple, lol, ou de manger ou de dormir, on a maigri à une vitesse effrayante, puis ensuite c'est la réalité elle-même qui ne nous convenait plus, c'était du bla bla sur des idées comme d'aller au bout du monde ou sur une île ou se tirer une balle dans la tête, lol... Et, quand il fallait quand même se quitter pendant quelques heures, on trouvait un prétexte pour s'engueuler, on claquait les portes et tout, pour que ce soit plus "simple"... Et en plus, on avait des rapports intimes dans des lieux inadéquats à l'expression de notre passion :-o lol :-p. On était heureux d'être malheureux ou malheureux d'être heureux (c'est une idée très intéressante quand on y pense à deux fois, c'est comme le pic de l'émotion). Et comme si ce n'était pas assez, son peuple et le mien sont des ennemis jurés, et encore, plein de trucs négatifs nous tombaient dessus, comme par hasard.
Le fait est que je ne perds jamais totalement le nord. J'ai un enfant, je ne peux plus me permettre de foutre ma vie en l'air et là, c'est ce que j'étais en train de faire. Donc voilà, etc etc etc, le fameux objet de désir a quitté le pays récemment, ce qui est une parfaite conclusion.

Vous avez vu le film "Transylvania" de Tony Gatlif? ARRR! ça c'est un hymne à la passion, je le conseille à tout le monde (rien à voir, hein, je fais juste un peu de publicité au passage :-) ).
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L'auteur : Tchit Kom
39 ans, Nantes (Etats unis).
Publié le 17 février 2006
Modifié le 16 février 2006
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