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Anthony Johnson, cette fois il fait le poids !

La voie était toute tracée. Le main event de l'UFC Stockholm allait acter la place de challenger du géant Suédois Alexander Gustafsson. La revanche face à Jon Jones promettait de relancer une division Light Heavyweight outrageusement dominée. Mais l'Américain Anthony Johnson a bouleversé la donne de manière fracassante. Une plus grosse surprise est-elle encore à venir ?


Le rendez-vous est pris pour le 23 mai. On saura alors si Anthony "Rumble" Johnson ira au bout de la sensation créée par son retour au premier plan. Si ce solide compétiteur trop vite oublié sera l'équivalent d'un Robbie Lawler, couronné en poids welters au moment où on ne l'attendait plus.

La carrière du prochain challenger de Jon Jones est jalonnée de remous et coups durs, en grande partie de la faute du principal intéressé. Flashback sur ce parcours en dents de scie, marqué par des passages dans quatre catégories de poids.


Un puncheur qui se cherche (2006-2011)

Comme beaucoup de pratiquants de sa génération, AJ débute dans des compagnies mineures, deux ans après l'acquisition d'un titre junior en lutte. Sur la scène d'Hollywood, en Californie, il ne fait guère de cinéma et exécute son opposant en un peu plus d'une minute. En septembre 2006, il participe à un mini tournoi sur la même soirée, l'éphémère Rocky Mountain Nationals. Il s'impose sans convaincre dans des combats ne comportant que deux rounds. L'événement est cependant médiatisé, via la présence d'un ancien de l'UFC Justin Eilers en main event, et sa localisation dans la ville historique du MMA américain, Denver.

La voie vers l'Octogone s'ouvre avec sa participation aux castings de la saison 6 de The Ultimate Fighter, puis par la blessure de dernière minute d'un combattant prévu à l'Ultimate Fight Night du 12 juin 2007. Johnson accepte d'affronter Chad Reiner (déjà auréolé de 15 combats pros) avec une préparation réduite à moins d'une semaine. Le genre de geste qui marque durablement le président de l'UFC, Dana White. Délai court, temps passé dans la cage en proportion : 13 secondes suffisent pour expédier son rival dans les limbes. Le jeune homme en ressort sûr de sa force, persuadé de faire de l'Octogone sa maison et de s'emparer un beau jour d'un titre de champion.

Des débuts retentissants l'entraînant à sauter trop vite les étapes. Trois mois plus tard, il croise déjà le fer avec un vétéran en la personne de Rich Clementi (alors 41 combats MMA à son actif). Le jeu au sol limité de Rumble lui coûte cher, une défaite par Rear-Naked Choke au milieu du 2e round. La défense de cette manœuvre de soumission s'avère toujours sa grande faille aujourd'hui. Une autre ombre au tableau en marge du duel avec Clementi : une présentation à la pesée au-dessus des 77 kilos requis pour sa division

L'élève des Blackzilians acquière la réputation d'un sportif peu rigoureux, et va l'entretenir à son corps mouvant. Au lieu d'opter rapidement pour une catégorie plus en phase avec sa morphologie, Johnson entend persévérer en welters, quitte à louper plusieurs pesées consécutives. Des adversaires conciliants et des résultats toujours probants (quatre nouveaux succès par KO pour une défaite accidentelle entre avril 2008 et octobre 2009) lui permettent de s'implanter durablement en valeur sûre de l'UFC.

En 2011, il domine trois rounds durant l'Anglais Dan Hardy, tout récent challenger de Georges Saint-Pierre, puis recadre la coupe afro de Charlie Brenneman par un terible head kick au 1er round. La course au titre s'ouvrerait-elle ? Oui, mais celle de la ceinture poids moyens. Rumble choisit précisément ce moment pour grimper chez les 84 kg... Et se présente encore au-dessus du poids !


Exil forcé mais doré (2012-2014)

Dana White ne supporte plus le côté dilettante de son fighter et pose un ultimatum : en cas de défaite contre Vitor Belfort, AJ sera licencié de l'UFC. Le Brésilien est parfait dans le rôle d'exécuteur avec un étranglement arrière imparable en fin de 1er round.

Nous sommes au début de l'année 2012 et Anthony Johnson semble grillé pour retrouver une place dans des organisations sérieuses. Nul ne peut alors imaginer qu'il ne connaîtra plus la moindre défaite. Sa relance passe par le Titan FC, compagnie spécialisée en reprise des brebis égarés de l'UFC. Il y croise Dave Branch en main event de la 22e édition. Toujours en middleweight, et toujours au-dessus du poids requis la veille du combat ! Nouvelle résolution dans le courant de l'été, Rumble rejoint les Light Heavyweight et atomise successivement Esteves Jones (Titan FC 24) et Jake Rosholt (Xtreme Fight Night 9). Une nouvelle organisation ambitieuse naît alors : les World Series of Fighting. Johnson en devient le visage dominant des premières éditions. En premier lieu, il assomme DJ Linderman (alors champion du King of the Cage) en moins d'un round, puis il obtient une décision unanime face à Andrei Arlovski lors d'une pige en heavyweight !

Un nouveau KO retentissant sur Mike Kyle début 2014 et les voyants se remettent à clignoter en direction de l'UFC.


Un profil encore jamais testé par jon jones

Comme souvent, Dana White et le matchmaker Joe Silva ne ménagent pas leurs enfants terribles. On lui fixe d'office un match piège contre le redoutable grappleur Phil Davis. Johnson, stabilisé aux environs de 93 kg, résistera-t-il aux velléités de soumission de Mr Wonderful ? Mieux, il impose son striking et manque de mettre KO Davis à plusieurs reprises. Quinze minutes d'une démonstration de force. Déjà son nom est murmuré pour remettre en cause l'hégémonie de Jon Jones, tenant du titre depuis mars 2011.

Dans cette entrevue pré-retour, il ironise lui-même sur ses problèmes de cutting, tout en confirmant les difficultés à vivre dans l'ombre du numéro 1 mondial des MMA.

Le style s'est affiné au fil des ans. D'un puncheur assez limité on est passé à un rouleau-compresseur implacable. Il va court-circuiter tous les plans en tyrannisant Antonio Rogerio Nogueira en 44 secondes, avant d'aller défier Alexander Gustafsson sur ses terres. Le mémorable duel entre le Suédois et Jones (UFC 165, septembre 2013) avait laissé croire à l'avènement d'un nouveau messie. Doté d'une taille équivalente au champion en titre, muni d'une allonge tranchante, pas manchot non plus pour le combat au sol, The Mauler s'affichait comme le prétendant idéal, une sorte de clone capable de faire vaciller son modèle originel. Or l'analyse omettait l'absence d'un attrait crucial dans le jeu de Gus : l'explosivité. Un travail de sape, aussi brillant soit-il, n'aura jamais l'effet du coup génial venu de nulle part. Ou d'un pilonnage en mode taureau enragé. Avec son allure trapue et ses déplacements sans fioriture, AJ est loin d'être auréolé de la classe d'un Lyoto Machida ou de la science tactique d'un Daniel Cormier, mais il possède en contrepartie l'audace et la puissance. En termes de plans et réflexions, tout a été tenté contre Jon Jones, serait-il temps de laisser parler la spontanéité ?
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L'auteur : Emilien Bartoli
41 ans, Toulouse (France).
Publié le 21 mars 2015
Modifié le 21 mars 2015
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