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Dur retour sur Terre

Après deux victoires contre l'Angleterre et l'Italie, les Tricolores se sont lourdement inclinés hier soir contre le Pays de Galles (6-27). Mais plus que la défaite et la perte du Grand Chelem, c'est le contenu de cette déroute qui inquiète à un an et demi à peine de la Coupe du Monde.


Il y a parfois des rêves qu'on aimerait qu'ils ne s'arrêtent jamais. Mais un rêve ne peut durer. A un moment ou à un autre, il faut bien revenir à la réalité, aussi dure et cruelle soit elle à côté du monde rêvé quelques instants auparavant. Dans cette histoire, le rêve, ce sont les deux premiers matches de l'Equipe de France dans ce Tournoi des Six Nations. Ce sont ces deux matches remportés à Saint-Denis contre l'Angleterre (26-24), il y a trois semaines, et face à l'Italie (30-10), il y a de ça quinze jours. Le retour à la réalité, c'est ce match complètement manqué face à des Gallois en quête de confiance après la mauvaise performance sur terre irlandaise. Maintenant, le Grand Chelem est perdu. Peut-on parler de déception ? Oui et non. Oui parce qu'après deux victoires dont une remportée courageusement en toute fin de match contre l'Angleterre, on se disait qu'il était possible d'espérer. On pouvait penser que Philippe Saint-André avait enfin trouver sa bonne étoile. Et puis, il est compliqué de parler de déception au regard de la saison passée, une saison ponctuée de deux victoires en onze rencontres et d'une dernière place au Tournoi.
A la limite, ce n'est pas la défaite qui est dure à avaler. Regardons les choses en face, ce n'est jamais facile d'aller gagner contre le Pays de Galles et encore moins dans une enceinte aussi surchauffée que l'a été le Millénium Stadium de Cardiff dont le toit s'était refermé à la demande des deux sélectionneurs. La défaite de l'Equipe de France pouvait passer. La manière avec laquelle elle s'est faite botter l'arrière-train, beaucoup moins. Tout, ou presque tout fut manqué hier. On commencera par la détermination. Sur les quatre-vingt minutes désastreuses de cette rencontre, les Bleus n'ont jamais montré qu'ils étaient venus pour remporter la mise. Un seul fait de match peut en attester. Ce fait remonte à l'entame du match. Une séquence d'échanges de coups de pied entre Français et Gallois où jamais un des nôtres n'eut l'idée de relancer à la main. C'est d'ailleurs à la suite de cette séquence de jeu qu'arriva le premier essai gallois. Une touche pas vraiment contestée, du jeu au large, de la percussion sur les impacts où les joueurs français furent dominés avant un coup de pied astucieux de Halfpenny. Au bout de cette frappe venait l'essai de North bien aidé par la terrible bévue de Jean-Marc Doussain, percutant Brice Dulin alors détenteur du ballon, pour offrir un boulevard au centre adverse.


Une entame désastreuse

Un essai casquette qui rappelait quelque peu l'entame de match des Tricolores en ouverture de Tournoi contre les Anglais. A une différence près. Cette différence étant que le XV de la Rose avait tenté de réagir au point de mener au tableau de marque à encore deux minutes de la fin. Pour revenir dans le match, encore fallait-il mettre toutes les chances de son côté. A commencer par transformer toutes ses occasions. Après une première réussite de trente-huit mètres légèrement de côté, voilà que Doussain allait manquer une tentative pourtant plus simple à trente mètres face aux poteaux. Après ça, ce fut à Jules Plisson de prendre ses responsabilités avec une réussite et un échec en deuxième mi-temps. Bien que les six points de plus marqués par les Bleus si ces deux coups de pied étaient passés entre les perches n'auraient pas changé grand chose au dénouement final de la rencontre. On se dit qu'il serait sans doute profitable d'avoir un vrai buteur dans cette équipe car la France se retrouve être la seule nation de ce Tournoi à jouer sans véritable buteur de métier, ce qui est un handicap certain à ce niveau là. Philippe Saint-André tentait de relativiser "ils font tous un sur deux tous les deux mais on se rend compte que Halfpenny en manque également. C'est vrai qu'ils ne sont pas buteurs attitrés dans leur club respectif mais je pense que Plisson peut vraiment progresser dans ce secteur". L'ouvreur du Stade Français fut d'ailleurs une des rares satisfactions que l'on a pu voir hier. C'est vrai, il s'est parfois précipité et a trop utilisé le pied surtout en début de match mais ensuite, il a gardé son calme et confirmé les bonnes performances vues sur les deux précédents matches.
Mais d'autres ont également sorti leur épingle du jeu. On pense à Yannick Nyanga qui s'est montré actif dans les rucks ou à Wesley Fofana qui fut au départ des rares incursions françaises en terres galloises. Sans ça, il faut bien avouer que tout est allé de travers pour PSA & co. Dix premières minutes bâclées. Avant même de finir le premier quart d'heure, le XV du Poireau menait déjà 11-0 à cause de l'indiscipline de Nyanga sur le premier regroupement qui offrait les trois premiers points à Mr Halfpenny. Cette indiscipline chronique qui suit les Bleus depuis un bon bout de temps et qui leur fait perdre des points bêtement au point d'énerver Philippe Saint-André "ce qui est le plus frustrant dans cette défaite, c'est qu'on leur donne tout. On fait trop de fautes, trop de fautes bêtes qui leur donnent des coups de pied de pénalités". Déjà sanctionnés contre l'Italie, les Tricolores virent sortir Nicolas Mas pour fautes répétées et Louis Picamoles pour faute d'anti-jeu et qui aurait d'ailleurs pu être exclus pour avoir provoquer l'arbitre avant de sortir pour dix minutes. Le sélectionneur poursuit "la discipline est tellement importante dans le rugby moderne. On sait qu'il faudra être plus discipliné lors des prochains matches".


Panne d'inspiration en attaque

Hormis l'indiscipline, le manque de construction en phase offensive est également un mal récurrent du XV de France. Des sorties de balles toujours aussi compliquées, à un tel point que Doussain dût laisser sa place à Maxime Machenaud à la mi-temps pour tenter d'accélérer le jeu français sans beaucoup plus de réussite. Des avants qui manquaient de percussion face aux montées meurtrières de leurs adversaires et qui reculaient sur la majorité des impacts. Même les hommes fort de cette Equipe de France, Louis Picamoles et Mathieu Bastareaud, furent incapables de faire la différence, le premier se retrouvant le plus souvent encerclé par trois Gallois avides de l'arrêter, le second prenant le ballon sans élan. Sans jeu au large et dominés dans le combats des avants, les Bleus se retrouvaient forcément en difficulté pour entrer balle en main dans l'en-but des Poireaux. Le plus souvent, cette faiblesse est compensée par la conquête qui réussit souvent aux Tricolores. Seulement, ce ne fut pas le cas hier. Entre les lancers plus que bancals de Dimitri Szarzewski et une mêlée chahutée pour ne pas dire enfoncée dans la plupart des cas même si l'arbitre fut sensiblement équitable au jeu des pénalités donnés en mêlées.
PSA a déjà prévenu qu'il ferait des changements en vu du prochain déplacement, dans quinze jours, à Glasgow. Avec soixante-neuf joueurs sélectionnés et dix charnière différente, on a bien peu que ce dernier n'ait déjà épuiser toutes les réserves du rugby français. Sa quête de changement mettrait largement en échec son envie de stabilité née aux détours d'une tournée en Nouvelle-Zélande après un Tournoi manqué de toute pièce. Changer, oui mais pour mettre qui ? Evidemment, si l'infirmerie, Dusautoir et Ouedraogo pour ne citer que les principaux, se vidait, ce serait pas mal mais la question à se poser est de la qualité intrinsèque de cette Equipe de France. Avec des gars comme Tolufoa ou Galan, les deux toulousains, qui peinent à trouver la régularité, on peut douter de l'existence d'un vivier de joueurs. N'oublions pas que depuis 2004, la France n'a remporté qu'une seule fois le Tournoi dans les catégories de joueurs âgés de moins de vingt ans. On pourrait citer les espoirs attendus de joueurs comme Plisson, Bonneval et Fickou est-ce que cela suffira à être prêt pour la prochaine Coupe du Monde qui se déroulera en Angleterre vers la fin 2015. Certains disent que quatre mois de préparation suffisent à se remettre au niveau. Pas sûr quand on pense que depuis deux ans et une autre défaite au Pays de Galles, cette équipe n'a pas réellement progressé, des questions peuvent se poser...
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L'auteur : Fruitier Manu
29 ans, Paris (France).
Publié le 28 février 2014
Modifié le 24 février 2014
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