| Et dire qu'il hésitait à le faireUn an après avoir enlevé le titre olympique sur 200m, Yannick a récidivé hier soir en écrasant, comme il l'avait fait à Londres, la concurrence. Très beau succès pour le nouveau poulain de Bob Bowmann qui hésitait à faire autre chose que les relais lors de ces Championnats du Monde.L'image du nageur se retournant en moins d'un quart de seconde après avoir touché le bord pour connaître sa place finale est devenue une habitude pour les amateurs de bassin. Il serait intéressent de revoir les images mais il semble peu probable que le Français ait eu besoin de faire ce geste pour connaître la place qu'il venait de prendre. Ou s'il l'a fait, c'était juste histoire de voir son temps, juste histoire de savoir s'il s'était approché du temps qu'il avait réalisé il y a tout juste un an dans l'Aquatics Center de la capitale Britannique. Mais, vu le sourire esquissé, vu les cris sortant de la bouche du, toujours jeune du haut de ses vingt-et-un an, nageur tricolore, on se dit que la seconde et les six centièmes supplémentaires passés dans le bassin Catalan ne l'ont pas embêté plus que ça (1'44"20 hier contre 1'43"14 à Londres lors de son titre olympique).
Il venait de gagner une course que pas grand monde le voyait gagner même si on se souvenait des propos tenus par Romain Barnier après les demi-finales "quand on voit ce qu'il a fait à Londres, on se dit que tout est possible et même s'il a eu une année post-Jeux Olympiques délicate avec sa séparation avec Fabrice Pellerin et sa nouvelle collaboration avec Bob Bowmann, il y a des qualités qui reviennent en finale" ou les paroles provenant du monstre Michael Phelps "je parle encore beaucoup avec Bob Bowmann et il me dit les grandes qualités de Yannick Agnel même si j'avais déjà eu l'occasion de m'en rendre compte aux Jeux Olympiques. Tout se jouera sur le départ. Il faut qu'il essaye de faire le même genre de course que lors de la finale des Jeux Olympiques. Il faut qu'il parte vite et qu'il fasse tout pour ne pas craquer". Yannick Agnel a, on s'en aperçu hier après-midi, suivi les conseils du plus grand nageur de tous les temps et d'un des plus grands sportifs de l'Histoire.
Son temps de réaction disait long de l'envie profonde de l'ancien Niçois de partir le plus vite possible. La coulée qui s'en suivit fut parfaite, au point que son bonnet blanc sortait des profondeurs du bassin du Palau Jordi Center devant la meute. Une foule d'adversaires qui ne pouvaient retenir la vitesse impossible du Français qui terminait sa première longueur en seulement 24"07. Mais partir si vite, peut-être trop vite si l'on en crût Agnel lorsqu'il apprit son temps au premier cinquante mètres, c'est prendre le risque d'exploser et de regretter un fougue trop exacerbée et c'est là que la tactique d'un 200m prend tout son sens car il est très simple de tomber dans le piège qui serait de vouloir boucler un 100m ultra rapide pour enfoncer le clou et le risque de s'effondrer par la suite s'en trouve multiplier. Yannick Agnel, lui, est un garçon très intelligent et il savait quoi faire "je savais que j'étais allé vite et j'avais peur de me cramer donc j'ai un peu contrôler en essayant de pas perdre trop d'avance non plus. Ce n'est pas facile à faire mais je pense que j'ai bien joué le coup".
Grand prince, il salue tout le monde
Sur la troisième longueur, il décidait de remettre les gaz pour évincer définitivement Ryan Lochte, Conor Dwyer et Danila Izotov qui ne pouvaient faire mieux qu'essayer d'accrocher les pieds de Yannick Agnel, en vain, "a la fin du premier 100m, je me sentais bien, j'étais encore bien alors je me suis dit d'en remettre un petit coup parce que, même si je ne voyais pas trop les autres, je me disais qu'ils pouvaient revenir". Il finira par un quatrième 50m en 27"20, très loin de sa première longueur qu'il avait bouclée en seulement 24"07 mais qu'on eut du mal à ressentir tant les autres étaient aussi crevés que lui "de toute façon, tu es forcément mort à la fin d'un 200m. Sinon, c'est qu'il y a un gros problème alors la joie a gommé un peu la fatigue mais je vous assure qu'elle est bien là, vous pouvez demander à mes bras" souriait le tout frais champion du Monde du 200m.
Une joie qu'il ne cherchait pas à cacher, qu'il ne voulait pas dissimuler. Il n'y avait plus chez Yannick Agnel cette pudeur aperçue à Londres comme si son départ du club de Nice, où il ne supportait plus le manque de chaleur humaine de Fabrice Pellerin qu'il accusait de mettre l'affectif de côté, l'avait transfiguré. Comme si son arrivée à Baltimore lui avait redonné l'envie de nager, comme si sa rencontre avec Bob Bowmann avait changé son tempérament discret pour laisser place au jeune homme de vingt-et-un ans qu'il est bel et bien. C'est par ce côté là qu'il essayait d'expliquer sa performance époustouflante "pendant les séries et les demi-finales, j'étais tendu, un peu stressé, sûrement parce que mon relais moyen du 4x100m m'avait un peu fait douter. Je mettais mes lunettes et j'étais très concentré. J'ai beaucoup parlé à Fernando Canales (adjoint de Bob Bowmann qui s'occupe de Yannick Agnel pendant ces Championnats du Monde car Bowmann ne peut s'occuper que de coureurs Américains) et il m'a dit de me relâcher, que je n'avais pas à avoir peur parce que je suis le Champion Olympique de la distance. Quand je suis entré sur le bassin, j'ai retiré mes lunettes, j'ai souris et j'ai même fait des coucous à mes proches qui avaient fait le déplacement.
Et ce qui l'attendait était à la hauteur de sa course, c'est à dire prodigieux car, comme depuis dimanche et l'ouverture de ces Mondiaux, c'est une standing ovation que recevait Agnel. Une foule habilée de bleu, de blanc et de rouge l'attendait et l'applaudissait. Tellement heureux qu'il se mettait à genou à peine sorti du bassin, le poing serré comme preuve du soulagement qui le gagnait, lui qui demandait il y a une semaine "une très grande indulgence quant à ses résultats en réponse à une année forte en rebondissement". Comme à son habitude, il saluait chacun de ses collègues finalistes du 200m. Sans trop de surprise, c'est Danila Izotov, qui a nagé quelques semaines à Nice et qui a donc cotoyé Yannick Agnel, et Conor Dwyer qui eurent droit aux plus chaleureuses accolades.
Conor dwyer prend l'argent
Conor Dwyer, le nouveau partenaire d'Agnel dans le club de Bob Bowmann, qui figurait également sur le podium pour y recevoir une belle médaille d'argent, ne s'étonnait pas de la victoire de son pote "je vois ce qu'il peut faire, la vitesse et la technique naturelle qui se dégage de lui et de sa nage. Il a la capacité d'aller encore plus vite. Pour moi, prendre la deuxième place, c'est le mieux que je pouvais espérer parce que le patron de cette finale, c'était lui et je pense que ça ne va pas changer dans les prochaines années". Le doublé Jeux Olympiques-Championnats du Monde, sur la distance du 200m, beaucoup de nageurs s'y sont cassés les dents et non des moindres. Le dernier en date a avoir réussi pareil exploit était Michael Gross en 1984 et 1986 alors que Ian Thorpe, Michael Phelps et Peter Van den Hoogenband avait échoué.
Le néerlandais se montrait étonné du déroulement de la course mais aussi très confiant en ce qui concerne le futur de Yannick Agnel "je ne pensais pas qu'il pouvait accrocher le podium et encore moins qu'il puisse l'emporter. J'ai pris une claque. La même qu'à Londres et peut-être même encore lourde parce que la surprise est énorme. L'écart qu'il a mis aux autres est énorme, alors que l'adversité était vraiment forte. Avec Bob Bowmann, il est vraiment entre très bonnes mains. Ses qualités physiques naturelles conjuguées à l'entraînement de Bob Bowmann va donner un résultat jamais vu. Agnel est excellent mais il fait encore des petites erreurs que seul Bowmann peut recrifier. Il peut gagner le 100m. Il a une vitesse impressionnente et une bonne resistance. A terme, il pourra gagner le 100, le 200 et le 400m, ce que Phelps n'a jamais réussi faire, ce qui montre la difficulté de la chose mais aussi le talent que je vois en Yannick Agnel"... | | |
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