| Eva Miranda"Le soap-opéra est beau, d'une beauté vulgaire et voyante qui attire l'attention et induit au péché"..."La famille Stone, richissime propriétaire d'une célèbre marque de boisson, va mal. Le fil, Ron, est amoureux d'une jeune femme sans le sou, Cindy, qu'il veut absolument épouser. La mère, farouchement opposée à ce mariage, intrigue secrètement pour le faire capoter. C'est à ce moment que débarque dans la vie des Stone Eva Miranda, femme splendide, mystérieuse et manipulatrice, qui entreprend de séduire le riche héritier, sa sœur, et le père tant qu'on y est.
À partir de cette histoire volontairement kitsch, Giardino dresse le portrait sans concession d'une catégorie sociale aisée et pleine de préjugés, tout en égratignant au passage la société de grande consommation dans laquelle nous vivons." (Présentation Casterman)
Après les séries à caractère historique et sentimental "Max Fridman" et "Jonas Fink", et le polar "Sam Pezzo", Giardino s'attaque au soap-opera complètement déjanté. Avec le scénariste Barbieri, il revisite l'univers des séries télévisées sur un ton décalé. L'humour au second degré est roi dans "Eva Miranda" (Sérieux s'abstenir !!!), où tout est volontairement grossi pour une dérision totale. La satire touche tous les personnages classiques des "telenovelas" et autres feuilletons : le jeune et riche héritier un peu niais, la mère liftée et névrosée, etc. Le tout est assaisonné de dialogues délirants, à la limite de l'absurde. Et pour faire vraiment "comme à la télé", les scènes sont entrecoupées de pages de pub intégrées au sein même des strips. Mais comme souvent, le rire n'est pas employé gratuitement. La société de consommation, symbolisé par la puissance de la publicité, est ici la cible des auteurs. Ils stigmatisent le "commérage" qui satisfait "l'irrépressible aspiration humaine à l'idiotie" (préface de l'album).
Au cœur de cette histoire, une femme attire les regards. Giardino aime ses femmes fatales. Souvent mystérieuses, elles sont trop belles pour être tout à fait honnêtes. Eva, fausse ingénue, va exercer ses charmes sur la famille Stone, pour arriver à ses fins. Arrivée pour séduire le riche héritier, elle troublera sa sœur mais aussi son père.
Giardino adopte un graphisme soigné, privilégiant la lisibilité, empruntant quelques-uns de ses traits aux conventions de la ligne claire, sans pourtant être prisonnier d'un code rigide. Et pour cette parodie, il se met à la caricature qui contraste avec ses albums précédents. La mère qui a du subir quantités de lifting, pour cacher toutes les rides qui lui rongent le cou, est particulièrement réussie. Le dessin lumineux correspond au clinquant du soap-opera. Son découpage révèle une maîtrise de la spatialité, qui est bien celle d'un metteur en scène.
"Laissez-vous séduire par l'art de l'intrigue d'Eva Miranda, laissez-vous envahir par les vicissitudes familiales de la riche famille Stone, productrice de la boisson Nana's, et attendrissez-vous de l'histoire d'amour entre son rejeton et la gracieuse Cindy, membre angélique d'une pauvre mais honnête petite famille de pâtissiers, les Cindy. Allez-y et vous découvrirez en vous, sans doute engourdi par des années d'études respectables ou l'exercice d'une honnête profession, l'irrépressible retour de l'âme de la commère. Nous vous aurons prévenus." (Préface de l'album)
Titre : Eva Miranda
Auteurs : Giardino – Barbieri
Editeur : Casterman
Collection : Un Monde | | |
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