| Jann Halexander ou la vie d'artiste...11 ans déjà que Jann Halexander erre dans le show-biz avec ses chansons mi-drôles mi-sombres. Son dernier album ne déroge pas à la règle...13 titres, pas un de plus, pas un de moins. 13, chiffre souvent maudit. Peut-être pas pour l'artiste, né un 13. Lui qui s'était fait connaître avecA Tablen'a pas de tubes mais des classiques qui lui collent à la peau : Aucune Importance', Il est minuit, Docteur Schweitzer', Déclaration d'amour à un Vampire', L'Amant de maman', ce n'est là que la partie émergée de l'iceberg. En effet, depuis 2003 l'artiste comptabilise un peu plus d'une centaine de chansons. C'était bien avant Stromae, certains le surnommaient alors l'Anti-Noah ou l'anti-Voulzy, d'autres raillaient son style ou sa façon de communiquer - de faire sa promotion. On ne peut vraiment pas dire qu'il ait gravi les charts mais le temps passant, il a écoulé des milliers de disques, dvd et livres, chanté en France, en Belgique, en Allemagne. Auteur-compositeur mais aussi interprète et pas uniquement de ses propres créations mais aussi bien d'autres artistes morts (Jehan Jonas, Francis Lemarque) que vivants (Anne Sylvestre, Mylene Farmer, Clémence Savelli), Jann Halexander s'est aussi illustré de façon moins convaincante dans des films expérimentaux un peu barrés mais suffisamment marquants, ou le théâtre. Prolixe, c'est surtout un artiste de scène, pour qui les albums ne sont que des prétextes à des concerts toujours plus étonnants, plus beaux, avec cette étrangeté qui lui colle à la peau.
Plus d'une centaine de chansons
'Un Bon Chanteur est un Chanteur Mortdoit être le 11ième ou douzième album de l'artiste. On pense d'emblée au petit livre de Dominique A, Un bon chanteur mort'. Ce qui marque c'est la dimension philosophique -pour grand public, hein- de ce nouvel opus. Finalement, un parcours comme celui de Jann Halexander est assez banal. La majorité des chanteurs ne déplacent pas des foules dignes d'un stade de France, ne squattent pas toutes les chaînes télévisions, y compris pour dire des choses inintéressantes. Et vient souvent le moment où quand l'artiste ne chante plus, quand il meurt, se créé une sorte d'aura unanime. D'où l'allusion à Allain Leprest dans le titrePostérité'. Titre éprouvant, où le chanteur cite les noms de femmes et d'hommes qui ont chanté, n'étaient pas très connus, et sont morts. Le message est clair : Jann Halexander s'inscrit dans une filiation, il prolonge le fil, ou plutôt une sorte de cycle étrange. Il est une étoile parmi d'autres étoiles, sombres, qui brillent de temps à autre, suffisamment pour créer la ferveur chez quelques personnes ici et là, mais pas assez pour déclencher le fanatisme, les mitrailleuses des appareils photos des paparazzis et la une des magazines. Mais voilà, il est étoile, autrement dit en anglais une star, il aime chanter en concert à chaque début a capellaJe suis une star et vous ne l'savez pas', subtile -ou grossière, c'est selon- façon de dire qu'il l'est. Et en effet, il n'est pas hors du système, il en fait partie, pleinement, il le reconnaît dans sa chansonUn Bon Chanteur est un Chanteur Mort : On ne peut pas dire que je hante vos télés [... ] je n'suis qu'un grain de sable dans la variété'. Mais il prétend aussi, libre à nous de le croire ou pas qu'il sefout pas mal de la postérité'. Le texte est sombre, un peu confus, l'anti-tube. Sauf que la musique résonne très variété grand public, construction rythmique entêtante, efficace, obsédante. C'est à la fois le point fort et le point faible de ce nouvel album. Arrangements synthés, boîtes à rythmes, atmosphère mainstream, l'artiste a assimilé certains codes, bravo, mais est-ce que cela lui va : le résultat est mitigé.
De la chanson à la variété
La frontière entre chanson et variété est très difficile à établir. Mais le chanteur passe doucement et sûrement de la chanson à la variété. Est-ce par nécessité ? Est-ce la preuve qu'il est maintenant, quoiqu'il arrive solidement établi. Ou encore une errance supplémentaire ? Il y a de gros ratages. Question : à barrer, à jeter aux oubliettes, texte trop long, rythmique zouk insupportable. Très belle reprise dela Javanaisede Gainsbourg, très émouvante. Moi qui rêve trop grandiloquente. Géniale chansonLe sexe triste', d'une simplicité et d'un humour désarmants. Un disque oscillant entre le chaud et le froid, l'ombre et la lumière, mais qui ne choisit jamais, ne tranche jamais. Un objet musical non-identifié. On finit par s'habituer. Au risque de hausser les épaules et de passer son chemin. Ou de crier au génie. Ou à la nullité. Reste à voir sur scène ce que l'album donnera. | | |
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