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Le Vieil homme qui n'écrivait plus

Marianne et Augustin se sont aimés. Aimer jusqu'à la mort...


Pour le tournage d'un film, la réalisatrice Catherine Voralberg retourne à Sainte-Geneviève qui a été le témoin des événements racontés par Augustin Morel dans son livre Marianne. Elle arrive à décider l'écrivain à venir la rejoindre dans le petit village où sa vie s'est comme arrêtée en 1944...


Casterman réédite ce mois-ci Le vieil homme qui n'écrivait plus, récit commencé dans la série (A SUIVRE) en mai 1995. Ne vous attendez pas avec cet album, à un univers à la Canardo, le célèbre détective de Sokal avec sa bouteille et ses cigarettes. Ici Sokal explore un univers complètement différent : un registre tragique et un traitement réaliste auxquels ne nous avait pas habitués l'ironie désabusée et animalière de Canardo (bien que Sokal dessine encore beaucoup d'animaux dans cet album, comme s'il ne pouvait s'en défaire). L'auteur nous conte les terribles amours d'Augustin et de Marianne, aux temps troublés des maquis et de la guerre, entre résistance et milice. "Histoire d'amour de deux enfants qui se retrouvent tous les ans aux vacances, histoire de mort de deux adultes dans le maquis français, quand la guerre fait rage et qu'il faut choisir son camp".


Bien des années plus tard, dans le petit village de Sainte-Geneviève, tout s'organise pour le tournage du film. Augustin Morel est de retour, luttant sans cesse contre la douleur sourde du souvenir. Son adolescence, la guerre, et surtout Marianne, Marianne à qui il a dédié sa vie pour mieux la rejoindre dans la mort. Mais son arrivée au village ne fait pas que des heureux, et certains voient d'un mauvais œil ce retour en arrière de l'histoire. Sokal nous convie à partager les passions et les remords du petit village de Sainte-Geneviève, où la vie ne s'écoule plus pareil depuis la fin de la guerre. Dans cet album, plusieurs destins se croisent symbolisant les différentes attitudes par rapport aux événements. Les thèmes de la culpabilité, du secret collectif, du tabou, de la honte sont très forts dans Le vieil homme qui n'écrivait plus. La seconde guerre mondiale, est une époque complexe, confuse où les attitudes et les relations humaines étaient extraordinairement exacerbées. Sokal s'en est donc emparé. Il montre aussi qu'il est très difficile de la juger aujourd'hui, après coup, car à son sens "dans la mesure où les décisions des uns et des autres par rapport au conflit ont parfois été autant affaire de circonstances que de choix délibérés."


L'homme qui n'écrivait plus appartient à ce qui est devenu un genre à part entière en bande dessinée : un grand roman de cent pages ou plus, en noir et blanc, avec une dimension personnelle assez forte. Dans cet album, Sokal s'intéresse particulièrement à la figure de l'écrivain et à la fonction de l'écriture. Morel croyait en effet évacuer tous ses douloureux souvenirs en écrivant son roman. Tout le récit démontre sa désillusion par rapport à cet espoir de délivrance. Morel idéalise le souvenir de Marianne, en fait quelque chose d'un peu sacré. Par son livre, il a en quelque sorte "embaumé" son premier amour, disparu prématurément en pleine passion.


Le tragique est donc omniprésent dans cet album et ne cesse d'accroître au fil des pages. Et la fin n'apporte pas l'apaisement espéré. Sokal crée un effet de surprise qui pourtant devrait être attendu par le lecteur. Entre les analepses qui nous font remonter au temps de la guerre, et les passages sur le film, l'auteur y entremêle aussi des passages d'enquête policière dont on ne comprend pas bien l'objet jusqu'à la toute fin. Le tragique explose dans toute sa splendeur (enfin si on peut dire !). Le lecteur déjà mis mal à l'aise par les souvenirs de Morel, ne peut être qu'affecté en refermant le livre...


Cette BD a été mise en couleur pour la réédition. Personnellement je préférais la version en noir et blanc, mais il est vrai que souvent les lecteurs préfèrent la couleur. La réédition sort aussi en grand format.


Pour résumer : "une histoire grave, sensible et poignante, où Sokal révèle impitoyablement les haines et les tragiques mesquineries des hommes. "

Titre : Le Vieil homme qui n'écrivait plusAuteur : Sokal
Editeur : Casterman
Collection : Un Monde
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L'auteur : Lorna Lorna
41 ans, Angers (France).
Publié le 28 octobre 2003
Modifié le 28 octobre 2003
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