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Mémoires d'un 100 Bornard (1)

Voici le récit d'une véritable épreuve, un vrai défi que je vous propose de vivre presque comme si vous y étiez. Tout au long de cette aventure, vous serez les témoins privilégiés de moments de doute, de joie, de peine, de douleur,... Bref de (quasiment) toutes les émotions par lesquelles un 100 Bornard peut passer.


L'on a beau avoir préparé pendant de longs mois (2 à 3 mois de préparations furent nécessaires pour ma part) ce que l'on attend avec impatience depuis plus longtemps encore, il est des moments que l'on redoute terriblement.
Nous sommes le mercredi 16 mai 2007, il est 6h 15 du matin. Cette journée s'annonce très longue, avec une matinée d'examen à l'université de 8 h à 12 h puis vient ensuite le temps d'une 2ème épreuve, plus singulière : les 100 km à pied. La matinée s'écoule lentement mais sans problème, cependant la suite est plus poussive. Juste le temps d'embarquer une salade composée à la sandwicherie de l'université et il faut déjà penser à prendre le train qui nous emmenera donc sur la ligne de départ.
Il est environ 13h 30 quand le train s'élance de Lille. Je déguste donc ce qui constituera mon dernier "vrai" repas pour 2 jours : du taboulé, un dessert et une boisson en canette de 33 centilitres. Stress et excitation commencent à se mêler à l'impatience présente déjà depuis le réveil.
A peine le train est il arrivé en gare qu'il ne faut désormais plus perdre de temps : retour en voiture, le temps est compté : 15 minutes pour préparer les affaires : sous-vêtements de rechange, quelques paires de chaussettes, plusieurs shorts et tee-shirts, sweat, brassard réfléchissant et lampe frontale (pour la nuit), coupe-vent imperméable (en cas de pluie), casquette (si le beau temps est au rendez-vous -on ne sait jamais- même si ça n'en prend pas la direction pour l'instant), pantalon de survêtement, chaussures "running", talc et le nécessaire en cas de problème physique : pommades,...
Me voilà donc paré pour l'aventure, le tout regroupé dans un grand sac. Il est 14 h 30, le temps pour moi d'aller aider à la mise en place de l'épreuve, jusque 17 h environ.
Ensuite, un petit tour au parking où les coureurs débarquent et se préparent, le temps pour moi de repérer quelques membres de l'équipe dont je fais partie et qui m'a accueilli afin de m'aider à aller jusqu'au bout de l'épreuve. Nous entrons donc dans la préparation proprement dite : on se met en tenue adéquate, et une odeur de pommade et de talc se mêle à la bonne humeur ambiante. On attend quelques retardataires, puis l'on élit le président d'équipe (la règle d'or étant que le dernier arrivé est nommé président), on prendutes les forc la photo souvenir d'avant course, on blague, on parle de choses et d'autres, on répète les chansons et hymnes de l'équipe, le départ approche à grands pas. Il doit être aux alentours de 18 heures 15 minutes lorsque nous nous dirigeons vers le parcage d'avant course, où sont rassemblés tous les concurrents qui s'élanceront désormais dans moins d'une heure. Un dernier tour aux toilettes, puis on glisse le petit bulletin de pointage qui témoigne de la présence d'un participant au départ et stress, excitation et impatience se font encore plus sentir. Désormais, il n'y a plus rien à faire, à part commencer à se demander quelle a bien pu être la satanée raison qui nous a poussé à se lancer dans une telle épreuve. 18 h 50 : la grille s'ouvre et l'on prend place sur la ligne de départ. A partir de maintenant, il est trop tard pour reculer, renoncer est impossible. Le conseiller général et le speaker prennent le micro, mais déjà leurs voix deviennent difficilement audibles. Certains coureurs ont l'air inquiets, stressés, d'autres sont confiants, déterminés, concentrés, sûrs d'eux. 18 h 59 : dans une minute, le départ sera donné et la voix du speaker devient plus rapide, on ne comprend plus trop ce qu'il dit. Il semble décompter le temps, du haut de son podium. Une détonation retentit, la foule commence à remuer, puis s'élance. Il est 19 heures et les choses sérieuses commencent. Le temps est menaçant : les nuages gris recouvrent le ciel depuis quelques heures déjà. L'équipe s'élance donc sur un rhythme volontairement peu rapide, car il ne faut pas se faire piéger dès le départ. Dès le premier virage sont entonnés des chants tandis que l'on double nombre de participants partis plus lentement. Beaucoup se demandent qui sont ces joyeux drilles qui ne semblent pas réaliser qu'ils sont venus pour faire 100 km à pied, en marchant ou en courant.
Le décor est planté, place maintenant aux 100 km à pied proprement dit.


1er et 2ème tour (soit un peu plus de 42,5 kilomètres) : "la mise en jambe"

Les 4 premiers kilomètres sont donc assez agréables car il s'agit d'un parcours dans le village, où les encouragements fusent de toutes parts. Il s'agit de se faire plaisir tous ensemble, avant que l'équipe ne se scinde en plusieurs petits groupes d'allures différentes.
Cependant, une difficultée supplémentaire vient très vite faire sont apparition, car la pluie décide de se mettre de la partie et ce, dès le 3ème kilomètre, mais de manière très discrète tout d'abord.

*4ème kilomètre : le circuit dans le bourg du village s'achève et les groupes d'allure se forment alors. Yves, grand habitué de ce genre d'événement, puisqu'il possède environ trente 100 kilomètres à son actif mène l'un de ce groupe, constitué de 3 personnes avec Christophe, qui va quant à lui tenter de boucler pour la première fois cette épreuve, et moi-même, dont la plus longue distance parcourue est la distance marathonnienne (soit 42,195 km). Le groupe a pour objectif de terminer l'épreuve en 16 heures environ.
On absorbe un petit verre d'eau au ravitaillement provisoire (il n'est présent qu'au premier tour) puis l'on continue et l'on cherche à acquérir de la régularité dans l'allure.

*KM 6 : un autre participant atypique nous rejoint et nous accompagne pendant quelques foulées, le temps d'échanger quelques paroles. C'est un grand habitué des lieux puisqu'il prend part pour la 16ème fois (sur 32 éditions) à cette épreuve, il est déjà bien en jambe, s'étant "entraîné" 3 jours avant en couvrant en 5 heures environ le marathon du Louvre Lille-Lens (42,195 km). Il porte d'ailleurs un numéro de dossard tout aussi symbolique : le 1111.

*KM 8,33 : premier pointage (il y a 3 postes de pointage sur le circuit), petit coup d'oeil sur le chronomètre -l'ordinateur indique 19 heures 52 minutes- et premier vrai ravitaillement où l'on peut trouver quasiment de tout : eau, glucose, jus de fruits, cola, fromages, pain, biscuits, fruits frais, fruits secs, sucre, chocolat, café, soupe, etc...). Juste le temps d'ingurgiter quelques morceaux d'orange, de fromage et un peu de ravitaillement liquide, puis nous voilà repartis, avec une tactique qui permet de s'alimenter et de digérer tranquillement puisque après les ravitaillements, nous marchons sur 500 mètres environ avant de nous remettre à courir jusqu'au prochain ravitaillement (il y a 6 postes de ravitaillement disposés sur le circuit).

*KM 11 : 2ème ravitaillement et ho ! Surprise, il est un peu difficile de s'arrêter car les jambes commencent à fonctionner toutes seules. Un peu de ravito liquide, fruits secs et aliments sucrés et nous voilà repartis !

*KM 14 : 3ème ravitaillement. Les bénévoles nous demandent comment nous nous sentons et nous encouragent, comme c'est le cas un peu partout sur le parcours. Boire, manger, puis repartir, mais là, c'est une longue ligne droite de 2 kilomètres qui nous attend !

*KM 16,78 : 2ème pointage, l'ordinateur indique un temps de 2 heures, il est donc 21 heures et 4ème ravitaillement. Ne pas oublier de manger pour éviter le coup de fringale et de boire sans attendre la soif. En route vers le prochain ravitaillement !

*KM 20 : 5ème ravitaillement, à 3,5 kilomètres de la fin du 1er tour (23,430 km). Manger et boire devient maintenant une habitude à chaque ravitaillement.

*KM 23,43 : fin du 1er tour, bouclé en 2 heures 51 minutes et 26 secondes. 3ème pointage, il est donc près de 22 heures. 6ème poste de ravitaillement qui permet de s'alimenter à chaque fois, en petites quantités.
Nous nous accordons une pause de 15 minutes environ entre la fin d'un tour et le début du suivant, le temps de passer aux toilettes, changer de tee-shirt et de chaussettes, de se reposer et de souffler un peu, et de s'équiper correctement pour la nuit : sweat, coupe-vent, brassard réfléchissant et lampe frontale. Il ne faut cependant pas trop traîner car l'on perdrait alors le rythme et des problèmes (crampes, douleurs musculaires,...) pourraient alors survenir. Vers 22 heures et 5 minutes, nous sommes donc repartis afin d'entamer la 2ème boucle (19,145 km).


Autant le 1er tour était assez difficile car il a fallu trouver le rythme, autant ce 2ème tour s'avérera plus tranquille car nous bénéfiçions de l'élan, le dynamisme et l'enthousiasme que nous procure le tour précédent, la nuit n'étant d'ailleurs pas encore complétement tombée à l'entame de cette 2ème boucle.

*KM 27,5 : 1ers ravitaillement et pointage de cette 2ème boucle. Il est environ 22 heures 45 minutes.
On reprend des forces pour cette nuit qui s'annonce longue et nous voilà repartis !

*KM 30 : 2ème ravitaillement du tour. C'est l'un des plus chaleureux du parcours car il est très illuminé la nuit et de la musique y est diffusée. Il faut manger et boire, même si ce n'est pas facile, du fait de la pluie qui ne cesse de tomber.

*KM 33 : 3ème ravitaillement en ce qui concerne ce tour. Les encouragements se font de plus en plus rares mais de plus en plus appréciés. Les bénévoles nous en "regonflent" tandis que nous nous alimentons avant de repartir en les remerciant et en leur donnant rendez-vous au prochain tour.

*KM 36 : 4ème ravitaillement et 2ème pointage pour ce tour. Il est près de 00 heure 5 minutes. Les lampes frontales sont allumées. Un peu de nutriments et nous continuons notre chemin, la route étant encore longue, et malgré la chaleur des bénévoles, nous n'avons nulle envie de nous attarder car le temps n'est vraiment pas au rendez-vous, jusqu'à maintenant.

*KM 39 : 5ème et avant dernier ravitaillement pour ce tour. Celui là, on l'aperçoit de loin, car il est situé en bas d'un pont, c'est donc assez rassurant et motivant de voir qu'il n'est pas très loin. Un peu de sucre, de liquide et l'envie de terminer cette seconde boucle nous fait continuer notre route.

*KM 42,5 : fin du 2ème tour, qui, bien qu'un peu plus court que le premier (19,145 km pour le 2ème tour contre 23,430 km pour le premier), aura été plus long pour nous. Le pointage indique 6 heures de course, il est ainsi 1 heure du matin et ce 2ème tour nous aura pris près de 3 heures 10 minutes (auxquels il faut bien sûr retirer 15 minutes de pause entre les 2 tours). Le petit break s'apprécie plus qu'au premier, car il faut absolument changer de tee-shirt, de chaussettes et remettre un peu de talc afin de se sentir un peu plus au sec, la pluie inondant le haut comme le bas de notre corps, et il est bien difficile dans le noir d'éviter les nombreuses flaques d'eau qui se sont formées tout au long du parcours. Il est donc 1 heure 15 minutes du matin ce mercredi 17 mai 2007 (hé oui, nous avons changé de jour !) lorsque nous nous élançons pour notre 3ème boucle.


3ème et 4ème tour (km 42,59 à 80,86) : le doute, les douleurs arrivent, le jour se lève...

Il est d'autant plus difficile d'avancer que c'est maintenant la pleine nuit, et nous avançons -en pleine campagne pour la majorité du parcours- à la lueur de la lampe frontale, et des éclairages disséminés ça et là à quelques carrefours dangereux du circuit, alors que la pluie ne cesse de tomber et semble au contraire redoubler d'intensité. A peine avons nous passé une nouvelle tenue et talqué nos pieds que, 500 mètres plus loin, nos chaussures sont inondées d'eau, ne voyant pas trop où se situent les flaques, il nous est bien difficile de les éviter.

*KM 46,5 : pointage-ravitaillement. On commence à apprécier ce ravitaillement installé dans une salle communale, car c'est un endroit très éclairé et chauffé, ce qui nous remonte quelque peu le moral. Il est maintenant presque 2 heures du matin et l'on s'alimente, les bénévoles nous parlent et nous encouragent, puis il faut trouver la force de repartir. Les redémarrages après les 500 mètres de marche sont de plus en plus difficiles, et Christophe gémit de souffrance à chaque fois que l'on reprend la course. Les muscles ont tendance à s'engourdir du fait de la température extérieure, la pluie n'arrangeant rien, il ne faut désormais plus trop traîner aux postes de ravitaillement.

*KM 49 : 2ème ravitaillement et déjà presque la moitié de la distance est couverte ! Il faut voir les choses du bon côté car il est difficile de positiver tandis que nous avançons dans le noir le plus complet à certains endroits du circuit, la nuit est longue et très obscure. Les bénévoles continuent de nous remonter le moral, et ces paroles nous sont très appréciables car désormais l'on ne croise plus beaucoup de monde sur ce circuit qui se déserte peu à peu au fil des abandons, les conditions météorologiques notamment ayant raison des plus faibles, mais aussi de celles et ceux qui se voyaient bien aller plus loin, mais qui ont du renoncer, pour diverses raisons.

*KM 52 : 3ème ravitaillement où des palettes ont été installées pour faciliter l'accès, la boue envahissant les alentours du poste. C'est le ravitaillement le plus isolé du parcours et bénévoles comme concurrents sont heureux de se rencontrer pour briser la solitude de la nuit. Petite pause histoire de manger, boire et échanger quelques paroles et nous voilà repartis vers le prochain pointage.

*KM 55 : 4ème ravitaillement et 2ème pointage en ce qui concerne cette boucle. Quelques amis nous félicitent pendant que nous nous restaurons, puis nous repartons. Cela fait plus de 8 heures 15 minutes que nous avançons à un rythme variable. Chaque relance est douloureuse, difficile et Christophe a de plus en plus de mal à "relancer la machine". Le doute nous assaillit de plus en plus : jusqu'où pourront nous aller ? Doute en effet, car il ne fallait tout de même pas penser qu'une telle épreuve allait se dérouler sans soucis. Mais Yves, habitué de ce genre de situation, nous rassure : il nous avait d'ailleurs prévenu à l'avance que le gros coup dur se situerait vers les kilomètres 55-60. Mais bon, l'on a beau être prévenus, on ne sait jamais trop à quoi nous devons nous attendre.

*KM 58 : nouveau ravitaillement. Il ne faut pas le "survoler", car il deviendrait alors difficile de continuer, mais trop s'attarder ne rendra la suite que plus difficile encore. Nous avalons donc quelques aliments et un peu de liquide, puis nous repartons sans traîner.

*KM 61,7 : fin de la 3ème boucle qui ne fut vraiment pas une partie de plaisir ! Nous avons mis près de 3 heures et 20 minutes pour venir à bout de celle-ci. La majeure partie du travail est effectué, mais il reste encore un peu moins de 40 kilomètres à parcourir. Les 15 minutes de pause ne sont désormais plus de trop, des douleurs commencent à apparaître un peu partout. Bernard, qui a des notions de kinésithérapie essaye de soulager nos douleurs physiques par des massages mais aussi les douleurs morales par de sages paroles. Mais pour Christophe, c'en est trop, il ne peut plus continuer et décide d'abandonner, même si cette décision est difficile à prendre. Il est un peu plus de 4 heures et demie lorsque Yves et moi partons dans l'optique de boucler ce 4ème tour.

*KM 65 : c'en est trop pour moi aussi. En bas d'un pont, découragé, je fais signe à Yves que je préfère continuer en marchant. L'abandon de Christophe a sans doute pesé au niveau du mental et, à moins d'un kilomètre du pointage-ravitaillement, l'allure va considérablement se ralentir en ce qui me concerne. J'essaye plusieurs fois de relancer ma course, mais rien à faire, tant le moral que le physique semblent atteints.

*KM 65,5 : A l'approche du ravitaillement et alors que le jour commence à se lever (Dieu que cette nuit semblait s'éterniser !), j'éprouve de plus en plus de mal à rester éveiller et dois faire beaucoup d'efforts pour ne pas m'endormir.

*KM 65,76 : alors que je m'aprête à pénétrer dans la salle de pointage-ravitaillement, j'aperçois Yves qui repart quant à lui déjà vers le prochain ravitaillement. Il me dit de boire beaucoup de cola pour éviter de m'endormir. Cela fait presque 10 heures 30 minutes que nous sommes en train d'arpenter ces chemins, il est donc aux alentours de 5 heures et demie du matin. Une personne de la Protection Civile me tend une couverture, je ferme les yeux pendant quelques minutes, avant de me décider à repartir.

*KM 66,5 : Que la marche est longue et saccadée ! Une douleur se fait sentir au dessus de l'adducteur. La pluie continue de tomber, et je suis maintenant seul dans ces chemins perdus où l'on ne croise vraiment pas grand monde. Désespéré par ce fichu sale temps qui n'en finit pas, je me mets à chanter "You'll never walk alone" (paradoxal, non ?) pour me redonner un peu de courage.

*KM 68 : voici enfin le ravitaillement ! Attendu, espéré, il devient un point d'ancrage pour continuer, un mini-but que l'on se fixe pour continuer et éviter de trop déprimer. Puis l'on voit les bénévoles, on mange, on boit un peu de cola et de café, et l'on a de nouveau envie de continuer, alors on repart, ne sachant pas jusqu'où, mais l'on repart quand même, d'autant que les bénévoles savent trouver la bonne formule pour nous revoir au prochain (et dernier) tour. (Même si un bénévole me demande si c'est mon dernier tour, je lui répond que ce n'est malheureusement pas encore le cas)

*KM 71 : nouveau ravitaillement. Je prends bien le temps de m'alimenter, de boire beaucoup de cola et de café, puis je m'asseois quelques minutes sur une chaise, histoire de souffler. Les bénévoles, très aimables comme toujours, me donnent rendez-vous au prochain tour. Néanmoins, je ne sais pas encore si j'y serai.

*KM 74,2 : pointage-ravitaillement. Il est presque 7 heures et 15 minutes. Le cola + café devient une habitude, et s'asseoir sur une chaise quelques instants presque un réflexe. Mais il faut repartir, car la marche est lente, la douleur dans au dessus des adducteurs devient de plus en plus intense, mais il faut aller au bout, de ce tour au moins.

*KM 77,5 : voici le fameux ravitaillement que l'on aperçoit de loin, mais qu'est-ce qu'il semble loin !
Cependant, un peu de cola, de café et de repos semble être la recette pour pouvoir continuer, car il reste maintenant un peu plus de 3 kilomètres pour achever ce terrible tour, qui semble si long ! Allez, il faut repartir, avec les encouragements infaillibles des bénévoles et d'autres coureurs qui me dépassent.

*KM 80,86 : fin du calvaire pour ce tour éprouvant ! Je suis néanmoins au bord de l'abandon, car je m'étais donné comme but d'aller au moins au bout de ce tour et, après 13 heures 30 minutes d'efforts, je ne me sens plus trop capable de continuer. J'ai donc mis un peu moins de 4 heures et quart pour parcourir les 19,145 km de ce tour. Il est 8 heures et demie et le moral comme le physique semblent être au plus bas. Cependant, à peine ai-je pénétré dans la salle de pointage-ravitaillement qu'une voisine me crie "Allez, plus qu'un tour ! ". Je me mets à y réfléchir à 2 fois pendant mon quart d'heure de "battement", Bernard tente de soigner ma douleur et me dit de me faire plaisir pour ce dernier tour. Il est drôle, lui ! Me faire plaisir avec plus de 80 kilomètres dans les jambes et encore 20 à se farcir ! Mais finalement, après avoir passé des vêtements secs, je me décide quand même à me lancer sur ce dernier tour, histoire de voir jusqu'où je peux aller (certains y verront une forme de masochisme, il y a sans doute un peu de cela). Il est vrai que je lance sur ce tour afin de ne rien regretter, d'aller au bout de moi-même, car je sais que si je ne le fais pas, je devrais attendre un an avant de pouvoir à nouveau tenter ma chance. Alors, c'est décidé, je vais tenter de les finir, ces 100 km ! Et puis je n'ai pas remercié les bénévoles...


5ème tour (KM 80,87 à 100) : l'effort final

Me voilà donc lancé dans ce qu'il convient d'appeler la dernière ligne droite de ces 100 km à pied. Il me faut jeter toutes les forces qu'il me reste dans ce défi que je suis en passe de réussir, non sans difficultée. Ce 5ème et dernier tour n'est paradoxalement peut être pas le plus difficile. En effet, bien qu'ayant déjà plus de 80 km dans les jambes, je commence un peu à y croire, même si le but est encore loin. Les 3ème et 4ème tours sont les plus difficiles moralement, car on est encore très loin du but, tandis qu'au 5ème, on peut se raccrocher à cet espoir de les finir. Puis, désormais, le jour est bien levé, et c'est beaucoup plus encourageant. Me voilà donc, arpentant pour la dernière fois (en ce qui concerne ces 100 km 2007) et lentement les routes et sentiers de campagne qui constituent le circuit.

*KM 84,9 : pointage-ravitaillement. Je continue bien sûr mon régime cola-café pour tenter de rester éveillé, ainsi qu'un peu de fruits. Le pointage indique près de 14 heures et 40 minutes d'efforts. Un peu de repos et il faut repartir. En repartant, je m'aperçois qu'il ne pleut plus (peut-être depuis un certain temps déjà). C'est un signe encourageant. Il me faut continuer.

*KM 87,5 : Et voici le 2ème ravitaillement, l'un des plus chaleureux. Je me ravitaille, me repose, discute un peu, puis repart malgré cette fichue douleur qui ne veut plus me quitter, il me semblait qu'elle était moins forte lorsque l'allure était plus rapide, mais rien à faire, je ne puis guère aller plus vite. Alors, il ne faut pas trop s'éterniser et reprendre la route après avoir remercié les bénévoles, lesquels nous donnent rendez-vous l'année prochaine.

*KM 90 : ravitaillement. Il ne reste plus que 10 km ! Cependant, il faut continuer à s'alimenter pour espérer aller au bout. Se reposer, manger, boire, remercier les bénévoles, puis repartir. Car ce n'est pas encore fini. D'autant plus que l'on aborde maintenant, pour la dernière fois, cette fameuse ligne droite de près de 2 kilomètres, si longue et décourageante.

*KM 93,35 : dernier pointage avant l'arrivée. Il est un peu plus de 11 heures 45 minutes. A l'approche du ravitaillement, une bonne surprise m'attend : mon père et ma soeur sont venus me voir et m'encourager, ce qui me remonte un peu le moral. Je me ravitaille suffisamment, avant de repartir. Un bénévole m'accompagnera même en marchant à mes côtés pendant 100-200 mètres. L'allure est lente, mais il me dit de ne pas me décourager, car je ne suis vraiment plus très loin de l'arrivée dorénavant. Pourtant, cette distance si insignififiante qu'il me reste à parcourir me semble énorme, car j'en ai vraiment plein les bottes. (ou plutôt plein les chaussures !)

*KM 96,5 : dernier ravitaillement. Quelques voisins faisant partie des bénévoles me félicitent et m'encouragent. L'arrivée est tout proche. Il s'agit pourtant de continuer à bien s'alimenter, boire et manger comme il le faut, se reposer un peu une dernière fois. Puis repartir, relancer la machine une dernière fois, il reste un peu moins de 3,5 kilomètres jusqu'à l'arrivée.

*KM 98,5 : voici de nouveau ma soeur qui va me suivre et m'accompagner jusqu'à l'arrivée. Un peu de réconfort après près de 35 kilomètres en solitaire.

*KM 99 : que cette inscription est réconfortante et grisante ! Espérée, attendue depuis maintenant plus de 18 heures de course, ce kilomètre mythique est enfin passé. Maintenant, c'est une certitude : j'irai jusqu'au bout, je serai 100 Bornard ! Quelques mètres plus loin, sur le trottoir opposé, j'aperçois mon grand-père qui, averti par mon père de mon passage, est sorti de chez lui pour me voir passer. Après une bise, je repart pour enfin terminer ces 100 km.

*KM 99,5 : Que l'émotion est forte ! Sur le sol sont dessinés à la peinture des couverts, avec la mention 500m en dessous, indiquant un ravitaillement à 500 mètres. Pour moi, cela signifie la fin imminente de l'épreuve, et de tant d'efforts. Je trouve que je m'en suis pas trop mal sorti après tout, le temps n'ayant pas vraiment été de la partie.

*KM 100 : ET LE VOICI, CE FAMEUX KM 100 ! En entrant dans la salle des sports, je montre mon dossard, pour la dernière fois. Puis des applaudissement jaillissent de toutes parts. Je suis complètement exténué, vidé, au bord de l'évanouissement mais heureux. Un petit coup d'oeil sur l'écran géant, qui indique que j'ai bouclé cette épreuve des 100 km à pied en exactement 18 heures 15 minutes et 22 secondes, ce qui est plus que satisfaisant pour un 1er essai sur cette distance. Il est donc 13 heures 15 minutes ce mercredi 17 mai 2007, et j'ai donc réussi mon défi qui était de terminer ces 100 km à pied 2007 (si possible dans un temps compris entre 15 et 20 heures). Puis, je retrouve les membres de mon équipe, pose pour une photo avec quelques coureurs de celle-ci, et une jeune femme se dirige vers moi. C'est une journaliste d'une radio régionale (FranceBleuNord) qui tiend à m'interviewer. Que d'émotions à cette arrivée ! Quelques autres coureurs de l'équipe viendront m'aider pour cette interview car je suis vraiment très fatigué et réponds avec peine aux questions de la journaliste. Puis, je rencontre Yves qui me félicite, Bernard soulage ma douleur musculaire, je retire le tee-shirt souvenir de l'épreuve, puis je rentre pour dormir pendant 2 heures, avant de monter sur le podium de cette édition des 100 km à pied 2007, épreuve de ma vie qui restera à jamais gravée dans ma mémoire.
Fin du spectacle, et à l'année prochaine.
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Re: Mémoires d'un 100 Bornard (1)
Posté par lamiss59 le 15/02/2009 12:57:13
Hey mais c'est moi ta soeur ! xD
T'inquiète, cette année je fais le premier tour avec toi, c'est PROMIS !
Re: Mémoires d'un 100 Bornard (1)
Posté par popito le 25/08/2007 17:16:47
7iris>> mais de rien, c'est un plaisir !
Re: Mémoires d'un 100 Bornard (1)
Posté par 7iris le 25/08/2007 17:12:14
Merci pour ton article, c'est très intéressant de partager cette épreuve avec toi !
Et bravo pour ton courage et ton obstination lors de cette course. Je reste admirative devant cet exploit...
Re: mémoires d'un 100 bornard (1)
Posté par popito le 25/08/2007 14:24:12
supernaut>>cela s'est déroulé à Steenwerck, situé à 30 kilomètres au nord de Lille, entre Armentières et Bailleul (si tu vois à peu près)

Modifié le 25/08/2007 14:24:50
Re: Mémoires d'un 100 Bornard (1)
Posté par supernaut le 25/08/2007 13:33:38
Et où est-ce que ça a eu lieu exactement ?
. Voir tous les commentaires et/ou en poster un (6)
L'auteur : ... ...
38 ans, Steenwerck (France).
Publié le 23 août 2007
Modifié le 20 août 2007
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