| PrésentimentUne archéologue de renom fait une découverte qui va bouleverser sa vie... A-t-elle seulement idée à quel point ?La mort me guette... Aussi terrible et absurde que cela puisse paraître, j'en ai la certitude... En tant que scientifique, je me dois d'être rationnelle mais, plus je m'efforce de l'être, plus ce pressentiment me pourchasse... Un long frisson me parcoure le dos et remonte tout le long de ma moelle épinière quand je songe au contact froid du quartz poli contre ma main...
Cela fait des années que j'étudie la civilisation aztèque sans que ma fascination ne faiblisse pour autant. Rien qu'en me retrouvant au pied de ces pyramides je suis en transe. Je revois ce fleuve de sang d'un rouge presque mordoré, coulant sur les marches... J'entends son appel... Je cours à sa rencontre, marche après marche, jusqu'à parvenir au sommet... Et là, j'ai Tenochtitlan à mes pieds ! Je fixe altière les alentours, je suis l'aigle perché sur un cactus qui tient en son bec un serpent, je suis Quetzalcóatl... Un peu plus, je m'abreuverai du sang frémissant de ce cœur que brandit victorieux le prêtre aztèque, nourriture des dieux... Mais, je ne suis qu'une simple mortelle en quête du passé afin de combler le vide de mon existence présente !
Lentement, je reviens à la réalité... Mes chimères... Cette pensée un peu plus obsédante chaque jour : MA MORT... Mourir, c'est renaître... Je le clame à chaque conférence alors, comment expliquer ma peur ? J'ai beau pérorer au milieu de mes confrères, je ne suis qu'une femme qui a peur de la mort...
Comment ne pas avoir peur quand ce sourire narquois vous fixe ? Quand ces orbites semblent vouloir débusquer votre dernier souffle ?
Je me revois agenouillée dans cette terre argileuse, mes longues boucles brunes retenues par un chignon pour ne pas me gêner mes fouilles... Quand soudain, la pluie... Je suis sans doute schizophrène, mais je jurerais qu'aux premières gouttes de pluie coïncide l'instant où je l'ai touché. Je touche cette surface en quartz poli et je tremble de peur... Je le caresse avec une fascination quasi amoureuse. L'os frontal à la douceur d'une fontanelle malgré ses tracés rudes et précis... C'est la première partie que j'ai senti vibrer sous mes doigts... Hallucination due à l'excitation fébrile qui s'était emparée de moi ? Je ne sais... Je me souviens juste que j'aie continué à creuser... Mes doigts s'enfonçant dans la boue, la remuant comme du terreau afin d'en extraire ma trouvaille... Comme par enchantement, une fois mis à jour, les rayons du soleil vinrent se refléter sur cette surface quasi diaphane créant autour de moi un halo de lumière insoutenable. Je me souviens aussi avoir fermé les yeux, prête à m'évanouir... Une fois sorti de terre, l'éblouissement passé, je l'ai détaillé ave une précision chirurgicale...
Rare son ceux qui savent qu'avant de connaître le rayonnement qui est le leur, les Aztèques furent, comme des parias. A la chute de Tula, en 1168 ils quittèrent Aztlán où ils vécurent près d'un millénaire... J'admire leur détermination et leur bravoure... Après une longue migration, ils s'arrêtent dans un petit groupe d'îlots perdus au milieu des marécages sur la côte ouest de la grande lagune de Texococo... Je suis intarissable sur le sujet... En fait, je crois, que je recule l'échéance du moment où j'aurais à faire part de ma découverte.
Les orbites, froides, profondes et pourtant si expressives qui semblent me fixer me donnent froid dans le dos... J'ai comme l'impression qu'elles me sondent avant de me dévoiler un terrible secret... Cette impression vient se confirmer à la vue de cette mâchoire proéminente dont les maxillaires semblent prêtes à broyer de l'acier... J'ai peur, je suis atterrée... La dureté de l'os nasal, toute cette précision des traits ne fait que venir confirmer ce sentiment de mal-être qui s'empare de moi à chaque fois que je regarde cette tête de mort... C'est sans doute une ineptie indigne de la grande archéologue que je suis, mais ma connaissance des aztèques vient troubler ma raison... La mort...
Ce soir-là, quand je rentrai au campement tous crurent que j'étais malade... Morte de peur, je regagnai hagarde ma tente... Je ne trouvai pas le sommeil, je me retournai dans mon sac de couchage, cherchant un moyen d'éviter l'inévitable... Cette force mystérieuse qui s'était emparée de moi me poussait vers le coffret... Je tentai de résister... Mais, j'avançais contre ma volonté, mon corps ne m'appartenait plus... Sans savoir comment, le crâne se retrouva entre mes mains
INFO-SOIR
La grande archéologue Théresa VAN DERGUT est en soins intensifs au centre hospitalier SANATORIO DURANGO de Mexico. Elle lutte entre la vie et la mort | | |
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